0 j'aime
La législation et les vices du cheval
Posté le 21/11/2014 à 16h43
Vaste sujet et surtout très technique. Madstripes sera sans doute mille fois plus professoral dans son expression que moi, je t'invite à lui envoyer un petit message. J'ai peur d'être un peu trop technique, la question l'étant je vais avoir des difficultés à avoir un discours très accessible.
Mais sommairement:
La première différence réside dans les contrats concernés par ces vices: les vices du consentement concernent TOUS les contrats, les vices cachés ne concernent que les contrats de vente.
La deuxième différence réside dans la chronologie: les vices du consentement relève de la formation du contrat puisque le consentement est un élément constitutif du contrat, alors que les vices cachés relève de l'exécution du contrat. C'est une différence somme toute assez théorique, mais elle implique un régime de responsabilité différent: le premier relève de la responsabilité civile délictuelle (article 1382 du code civil), le deuxième de la responsabilité contractuelle (article 1147 du code civil).
Une troisième différence apparaît dans les délais pour agir: le délai pour une action relevant des vices du consentement est de 5 ans, pour les vices cachés c'est 2 ans.
Ensuite, si on entre dans le fond de ces vices. Les vices du consentement englobent l'erreur, le dol et la violence (tu n'avais relevé que le dol).
L'erreur est une fausse représentation de la réalité, elle porte notamment sur une qualité substantielle de la chose, sur la substance de cette chose. En matière d'oeuvre d'art - la majorité du contentieux - c'est l'affaire Poussin: je pensais cette toile de Poussin, on m'a affirmé que cette toile était de Poussin, j'ai payé donc payé une fortune pour cette toile présentée comme réalisé par Poussin, et il s'avère que non, c'est une toile réalisée par un inconnu. Pour un cheval, j'ai acheté un cheval plein papier, on m'a affirmé qu'il était plein papier, ça conditionnait mon achat, or c'est un OI, je l'ai dans l'os, je peux demander la nullité du contrat pour erreur sur une qualité substantielle.
Le dol est constitué dans un premiers par des manoeuvres et des mensonges (élément matériel du dol). Le vendeur a caché la vérité à l'acheteur (il y a quand même toujours une part de mensonge toléré dans le cadre d'une présentation flatteuse de la réalité, tu vas systématiquement dire: ce cheval c'est une grosse carne, on va tolérer que tu présentes l'animal sous son meilleur jour). L'élément intentionnel du dol c'est l'intention de tromper, le vendeur en connaissance de cause, te cache un élément important. Par exemple: il drogue le cheval pour qu'il paraisse plus calme lors de l'essai conduisant à l'achat.
La violence c'est une contrainte physique ou morale poussant une personne à contracter, ton consentement n'est pas libre ou éclairé puisqu'on t'a contraint par des menaces par exemple à contracter. Si je te mets une arme sur la tempe pour t'obliger à signer un contrat, ça relève de la violence.
Maintenant les vices cachés, il s'agit d'une garantie légale qui doit répondre à trois critères: être caché, c'est à dire non apparent lors de l'achat (pas forcément dissimulé par le vendeur qui peut lui même ne pas être au courant), rendre le bien impropre à l'usage auquel on le destine ou diminuer très fortement son usage, exister au moment de l'achat.
Tu as acheté un cheval pour du loisir, il se trouve que ce cheval n'est pas montable pour des raisons vétérinaires et ces raisons existaient dès l'achat du cheval. Tu pourras agir sur le fondement des vices cachés, mais il faudra prouver que ce défaut existait lors de l'achat du cheval, c'est point le plus délicat.
Ca ressemble à l'erreur hein?! Eh oui. Tu pourrais très bien agir sur le fondement de l'erreur aussi. Mais une différence notable apparaît pour l'erreur: l'erreur sur les motifs (sur les raisons qui t'ont poussées à contracter) n'est pas admise. Or dans les vices cachés on voit apparaître la notion d'usage auquel le bien était destiné, ce qui se rapproche des motifs. Tu voulais un cheval pour faire de la balade, du loisir, c'est la raison pour laquelle tu as acheté ce cheval, c'est le motif de l'achat. Invoquer l'erreur te sera sans aucun doute difficile si le cheval n'est pas montable, on considérera que tu voulais un cheval et que tu as un cheval, pas d'erreur. Mais le vice caché sera possible, car le cheval est impropre à l'usage auquel il était destiné.
Enfin la dernière différence majeure, c'est ce que tu peux obtenir en démontrant qu'il y a vices du consentement ou vices cachés. Pour les vices du consentement, c'est la nullité du contrat: je te rends le cheval, tu me rends mon pognon. Pour les vices cachés on peut obtenir une diminution du prix du bien à hauteur de ce qu'il vaut vraiment avec ce vice, donc tu n'as pas à rendre le cheval.
Tout cela n'est en effet que subtilité juridique. Peut être suis je aller trop loin.