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Voici la réaction de Bénédicte Émond-Bon, sélectionneuse nationale de l’équipe de France d’endurance, à l’issue de l’invraisemblable annulation de la course d’endurance des Jeux équestres mondiaux de Tryon:
"Il est évident que nous avons déjà disputé des courses dans des conditions plus difficiles que celles-ci... Et il n’y avait pas tant d’éliminés que cela. La vraie histoire, c’est que, depuis que nous sommes arrivés ici, l’organisation de cette course n’est à la hauteur en rien. Ni l’hébergement des chevaux, ni la piste, ni l’aire de vet gate ni l’aire de grooming, ni dans la gestion de l’épreuve, ce qui n’est finalement que la suite logique de ce que nous vivons depuis notre arrivée... C’est n’importe quoi. Comment n’a-t-on pas su indiquer à tous les concurrents la zone de départ d’une course aux Jeux équestres mondiaux? Tout a été construit hier et avant-hier. On ne savait même pas où serait l’aire de repos des chevaux. On ne connaissait pas les boucles non plus, ce qui peut expliquer les erreurs de parcours de ce matin. Je n’ai jamais vu un tel gâchis.
Toute l’équipe de France (ce qui représente une délégation d’une cinquantaine de personnes, ndlr) est extrêmement déçue. Malgré toutes ces difficultés, nous avons réussi à gérer la course au mieux. Nos quatre chevaux étaient en parfait état de forme, notre tactique fonctionnait. Nous pouvions espérer décrocher deux médailles (probablement l’argent par équipes et au moins le bronze individuel, ndlr). Et là, on annule la course, prétendument pour préserver le bien-être des chevaux parce que certains auraient été conduits à la clinique. Si c’est le cas, la responsabilité incombe aux officiels, qui auraient dû les éliminer plus tôt. Ils sont fautifs là aussi.
À travers cette décision, ils punissent tous les chevaux qui ont évolué à la bonne allure et dont les cavaliers ont tenu compte des conditions. Tous ceux qui étaient encore en lice et couraient avec nous étaient en très bon état. On les a bien vus quand ils sont revenus. On punit les cavaliers qui font preuve de respect envers leurs animaux et on crédite ceux qui n’écoutent pas leurs chevaux en annulant une épreuve parce qu’ils ne peuvent plus figurer au classement... C’est un non-sens total, c’est inacceptable et scandaleux. Notre révolte collective était assez claire je crois. Malheureusement, je crains que cela ne signe la mort de l’endurance. On ne peut pas continuer comme ça..."
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Voici la réaction de Jean-Philippe Francès, troisième au classement provisoire avec Tarzibus avant l’invraisemblable annulation de la course d’endurance des Jeux équestres mondiaux de Tryon:
"Notre sport est en train de changer fondamentalement, et il est géré par des personnes sous influence ou pas suffisamment compétentes. Toute la semaine, nous avons évolué dans des conditions déplorables. Ce matin, les officiels n’ont pas été capables de donner véritablement le départ de cette course, ce qui n’est quand même pas si compliqué... Nous avons été plusieurs cavaliers influents à demander à ce que cette course soit annulée parce que cela n’avait pas de sens de continuer avec des chevaux n’ayant pas couru la même distance, avec des différences de plusieurs kilomètres. Le temps de repos demandé n’a pas été équitable pour tous les concurrents. Ce n’était déjà plus un championnat du monde. Mais la FEI ne nous a pas écoutés... Après, nous nous doutions que cela se terminerait en catastrophe, et c’est malheureusement ce qui s’est passé.
Nous avons fait courir nos chevaux pour rien. Nous avions des chances de médaille... Tarzibus est un cheval très spécial. Malgré les sommes énormes qu’on nous a proposées pour l’acheter, ce qui fait probablement de lui le cheval le plus coté de l’histoire de notre discipline, Sabrina (Arnold, championne d’Europe avec lui l’an passé à Bruxelles, ndlr) et moi avons fait l’effort de le conserver avec ce seul objectif en tête. Et ça se termine comme ça...
En ce qui me concerne, quels que soient les résultats, j’avais pris la décision de mettre un terme à ma carrière internationale. Franchement, ça me désole de la terminer de cette manière... Je verrai dans les jours à venir, à froid, ce qu’il en sera.
Je pense aussi au sponsor de cette course (Meydan, société détenue par la famille al-Maktoum, régnante de l’émirat de Dubaï, dont trois membres composaient l’équipe émiratie aujourd’hui, ndlr), qui a donné suffisamment d’argent aux organisateurs pour que nous puissions concourir dans de bonnes conditions, ce qui n’a pas été le cas du tout. Et enfin, c’est désolant pour notre discipline, qui était déjà montrée du doigt depuis plusieurs saisons. Là, nous avons touché le fond...»
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Voici la réaction de Sophie Dubourg, Directrice Technique Nationale de la France, après l'annulation de la course d'endurance des Jeux équestres mondiaux de Tryon :
"Je tiens tout d’abord à souligner l’exemplarité de nos cavaliers. Nos quatre chevaux étaient en excellente condition et ont terminé cette "demi-course" en très bonne santé ce qui prouve le travail formidable des cavaliers, du staff, de l’entraîneur et de tout leur entourage, dont les familles des plus jeunes cavaliers, au même titre que l’équipe d’Espagne. Ce sont deux équipes qui se sont démarquées. La position de Jean-Philippe Francès était aussi très prometteuse, nous passons sûrement à côté de deux médailles... Il y a donc une frustration sportive mais il y a surtout de la colère. L’annulation de cette course a été mise sur le dos du bien-être du cheval, mais aujourd’hui il y a eu un amoncellement d’erreurs de l’organisation et une absence de contrôle de la FEI, l’un comme l’autre ne s’étant pas assurés des conditions indispensables pour pouvoir organiser une course de cette envergure."
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''IL Y AURA UN AVANT ET UN APRÈS TRYON POUR L'ENDURANCE'', NICOLAS WALHEN
Après le terrible fiasco de la course d'endurance des Jeux équestres mondiaux de Tryon hier soir, la dite-discipline est assaillie de tous les côtés... Nicolas Wahlen, Président de l'Alliance of Endurance Organizers et en poste durant les Jeux de Normandie il y a quatre ans notamment, n'en démord pas : il y aura un avant et un après Tryon pour sa discipline de coeur.
GrandPrix-Replay : Quel bilan pourriez-vous tirer de ces championnats du monde d'endurance, que vous avez vécu à distance ?
Nicolas Wahren : C'était une situation surréaliste. J'ai suivi la course sur les écrans, et c'était très prenant. En trente ans de carrière, je n'ai jamais vu ça ! Ce qui est arrivé a été le facteur de plusieurs causes. L'organisation en premier lieu, et le délégué technique n'a pas dû faire parfaitement son travail. J'ai vu énormément de choses dans tous les événements où j'ai officié, mais jamais de telles! Comment ont-ils pu organiser une course dans ces conditions? C'est un monde de fous... Je ne tiens pas forcément à jeter la pierre à l'organisation, mais c'est un fait.
Puis le jury et les officiels ont donné deux départs ; ça parait improbable! Le Président du jury est censé être sur la ligne de départ! Les stewards, pour des raisons abstraites, ont demandé à certains couples de partir à gauche et d'autres à droite... Quant aux problèmes de balisage lors de la première boucle, c'est vrai qu'aux Etats-Unis, les raids d'endurance se courrent moins vite, donc les flèches peuvent souvent être moins bien positionnées. Après, je n'étais pas sur place, mais c'est ce que j'en ai vu sur les images. À partir du moment où vous donnez deux départs différents, il n'y a forcément plus aucune possibilité d'égalité de chances.
Puis la météo est venue s'ajouter... D'après eux, il y avait une humidité terrible, une chaleur écrasante, et plusieurs chevaux se sont retrouvés à la clinique...
Et enfin, il y a toujours ces conflits d'intérêts entre les instances internationales et les partenaires... Voir que Meydan, avec qui j'ai pourtant de bonnes relations puisque j'ai longtemps travaillé avec eux, était sponsor du championnat m'a choqué. Aux Jeux équestres mondiaux de 2014, c'était totalement interdit. La FEI nous avait bien dit qu'il était impossible qu'un championnat FEI soit détenu par une marque, pour justement éviter des conflits d'intérêts politiques et financiers...
GPR : Pour revenir sur le début de la course, qui a été interrompue à cause de défauts de signalisation ; n'y a-t-il pas une reconnaissance de la course au préalable ?
N.W. : D'après ce qui a été dit, les équipes n'ont pas pu accéder à la reconnaisance de piste, mais je n'y étais pas donc je n'en sais rien. Ce qui est sûr, c'est qu'à chaque course d'endurance, les cavaliers ont normalement le droit de marcher la dernière boucle la veille. Et en ouverture de course le jour-même, il y a toujours un ou deux véhicules, l'un partant cinq minutes avant le départ pour vérifier le balisage, et l'autre en même temps que les chevaux. Nous ne savons pas ce qu'il en a été.
GPR : Un certain nombre de commentateurs ont avancé le fait que la course aurait pu être annulée parce que les officiels auraient subi des pressions des pays du Golfe, notamment les Emirats arabes unis, qui n'avaient plus un seul représentant à mi-course. Qu'en pensez-vous ?
N.W. : Je ne pense pas que ce soit le cas. Mais j'aurais bien aimé être une petite souris pour savoir ce qu'il s'est réellement passé! Encore une fois, tout est histoire de politique et finance. Ce qui est sûr, c'est que ces cavaliers veulent prendre la tête de l'endurance. Ils le montrent très clairement depuis plusieurs années en organisant un grand nombre de compétitions. N'oublions cependant pas que beaucoup de monde vivent de ces financements. La critique est facile...
GPR : Ce scénario catastrophique est venu une nouvelle fois entacher la réputation de l'endurance...
N.W. : Il y a une épée de damoclès au-dessus de l'endurance depuis quelque temps, qui est le bien-être des chevaux. Nous allons rentrer dans des considérations très complexes parce qu'aujourd'hui, notre sport est difficile à pratiquer à cause de la publicité qu'on en fait. Faire galoper un cheval sur 160km devient difficile, et aller au bout va aujourd'hui devenir exceptionnel. Pour moi, il y aura un avant et un après Tryon. Certains profiteront de la situation pour faire valoir ce qu'ils croient bon. Il y a plusieurs chapelles dans le monde de l'endurance, il faut être honnête! Et une n'est pas à blâmer plus que l'autre. Ce qui est arrivé à Tryon était inévitable, parce que tous les cavaliers ne pratiquent pas le même sport. C'est le résultat de plein de compromis. Ce qui est étonnant, c'est que nous avons plusieurs fois proposé des réformes pour l'endurance par le biais de l'Alliance of Endurance Organizers, afin de créer deux courses distinctes par exemple. Tout ça est constamment balayé par la FEI pour un tas de raisons. Nous avons l'impression qu'il n'y aucune écoute possible. Quelle image va-t-on donner à cette discipline... Je pense que cet événement va donner un coup de pied dans la fourmillière, donc c'est presque un mal pour un bien. Il serait normal qu'il y ait une démission à haut niveau par exemple. Mais tout ça va réduire considérablement notre crédibilité...
GPR : Qu'avez-vous pensé des performances des Tricolores? L'équipe de France et Jean-Philippe Francès étaient bien partis pour décrocher des médailles!
N.W. : Les comportements des Bleus ont été exemplaires. Quand la course a été arrêtée, Jean-Philippe Francès était en argent puisqu'il avait déjà ratrappé Alex Luque Moral, dont la jument commençait à ralentir, et était bien parti pour prendre la tête dans la dernière boucle. C'est plutôt une médaille d'or qui se profilait en individuel. Par équipes, la France a fait ce qu'elle savait faire dans la discipline. Aujourd'hui, l'endurance se résume aux victoires des cavaliers du Golfe, aux Espagnols si ces derniers explosent, puis la France qui n'est jamais loin dans les rendez-vous.