cavaliere94
Citation :
C'est sur. Je me pose surtout la question de l'évolution du comportement des chevaux à partir du moment où ils comprennent que prédateur il y a bel et bien dans les parages. Puisque nous on leur apprend que non t'inquiètes, ça c'est pas dangereux, etc, mais une fois qu'ils ont vu de leur yeux que la haie qui bouge c'est effectivement un carnivore qui y passe, j'imagine que l'émotivité est plus dure à gérer derrière.
Le cheval a un instinct de défense face à une situation qu'il évalue comme insécurisante, lorsqu'il se sent en danger. Je ne pense pas qu'il possède un classement des espèces prédatrices et non prédatrices sur la base d'un profil morphologique (à part peut-être la peur du serpent, assez étonnante à observer parfois...
). Il réagit face à un comportement particulier qui lui envoie des signaux de prédations imminentes ou des informations dans son environnement qui lui apparaissent suspectes (odeurs, bruits, modifications anormales des éléments familiers, choses nouvelles qu'il ne connait, reconnait, pas...)
C'est pour ça qu'il montre des signes de peur face a des choses qui à nos yeux ne le justifient pas. Mais lui détecte plus que la chose elle-même, des choses qui nous échappent car elles sortent de nos propres schémas de sauvegarde. A chaque espèce son schéma et ses déclencheurs.
Un loup ressemble a un chien ou à un renard.
Un cheval habitué aux chiens ne réagira pas tant que les chiens ont un comportement "habituel". Dès que le chien adoptera un comportement "anormal" ou avec des signaux s'apparentant à une agression, le cheval déroulera ses comportements de fuite et de défense, pourtant c'est un chien et à la base il cohabite avec l'espèce sans problème.
A partir de là, tant que le loup ne rentre pas dans l'environnement du cheval avec une attitude de prédation, le cheval le cotoyera comme il le fait avec un chien ou un renard ou un sanglier ou n'importe quel autre animal de son environnement.
A la limite, la nouveauté totale peut engendrer un période d'inquiétude et d'observation mais la cohabitation s'organise et les comportements s'adaptent aux situations ?
Dans la nature, toutes les espèces cohabitent, les actes de prédation ont lieu quand le prédateur est en quête de nourriture, quand il ne l'est pas, la proximité existe sans problème. Un prédateur n'est pas un rageux qui devient agressif dès qu'il voit un autre animal. Il devient "rageux" uniquement quand il a faim et s'il a obtenu sa quantité journalière voir plus avec une prise, il ne chassera plus durant plusieurs jours.
Il faut aussi rappeler que les prédateurs ne font pas mouche à chaque attaque, c'est compliqué de chasser, c'est une grosse dépense d'énergie. Je crois que pour réussir une capture, il faut compter 8 ou 10 tentatives qui n'aboutiront pas et où le prédateur s'épuise.
Dans son schéma comportemental le cheval traite alternativement toutes sortes de situations apaisantes ou stressantes et y apporte les réponses adaptées. C'est son éthogramme. Comme tout animal de proie. Il redescend en pression comme il monte. C'est normal. Il est "conçu" pour ça.
Il n'y a qu'à observer la rapidité de passage d'un état à l'autre quand il est dans un pré dans son groupe de référence. La surveillance collective, les alertes, les spots de vigilance, la coordination du groupe dans sa gestion, ça valide ou invalide, si ça valide collectivement, tout le monde se regroupe, les stratégies de fuite se dessinent (car non le cheval ne fuit pas bêtement devant lui comme un cagole), bref, un groupe chevaux qui gère une situation de crise c'est remarquable de coordination pour peu qu'il soit dans un espace adapté.
Les grands herbivores ne sont pas des proies aussi faciles. Ils ont de cornes, des sabots, ils sont plusieurs, instinctivement coordonnés, ils sont vifs et puissants. Ils ont des schémas comportementaux de survie efficaces sinon ils auraient tous disparus de la surface depuis longtemps (sauf quand l'humain se pointe avec ses armes et fout le dawa en exterminant tout ce qui lui déplait).
Bref, les chevaux sont moins vulnérables que des moutons, des chèvres ou des poules par exemple.
Si on compare aux espèces du continent africain, il semblerait que les zèbres ne sont pas les mets privilégiés des fauves car ils représentent plus de danger de blessure que les gazelles. Ils sont plus endurants, plus agressifs. Les bêtes cornées doivent rompre la course et faire face pour se défendre, ce qui les rend vulnérables si la prédation se fait en groupe, les équidés balancent de redoutables coups de pieds pendant la course, ils sont plus compliqués à arrêter et isoler.
D'où l'importance d'avoir des chevaux en groupe et dans un espace conséquent pour que le groupe puisse avoir des options en terme de regroupements, trajectoires, vitesses....
Alors oui, un herbivore reste toujours une proie pour un carnivore mais il y a aussi une échelle du risque pour le prédateur dans son acte de prédation et d'instinct, à choisir s'il le peut, le prédateur prend le moins de risque possible car toute blessure un peu sérieuse est un arrêt de mort et l'instinct de survie fonctionne en général très bien pour toutes les espèces, qu'elles soient prédatées ou prédatrices. D'ailleurs dans les conflits intra-espèces, tout est très codifié pour que les animaux évaluent vite le pus faible du plus fort avec des joutes d'intimidations permettant au plus faible de renoncer avant que les deux ne prennent le risque de blessures sérieuses.
Dans les forêts autour de chez moi il y a beaucoup d'animaux. La plupart de chevaux avec qui j'ai pu aller en forêt réagissent fortement à la présence du sanglier par exemple, que ce soit en l'entendant, en le voyant ou juste en sentant son odeur. Par contre, quand ces mêmes chevaux sont dans leur pré, le sanglier peut le traverser, y trainer, être très en proximité, les chevaux ne réagissent pas. A la limite, certains vont l'observer un peu mais aucune peur. Les réactions seront différentes si le sanglier traverse le pré à fond les ballons parce qu'il a les chasseurs aux fesses. Là les chevaux vont s'écarter, se mettre à courir, souffler puis une fois l'intru parti, ça retombe comme un soufflé et tout le monde recommencer à brouter ou se reposer.
C'est l'attitude qui compte, pas l'animal.
Le risque zéro n'existe pas, mais je pense qu'il faut revenir à une évaluation plus conforme à la réalité de ces espèces et de leur cohabitation.