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Propriétaire et hypersensibilité/culpabilité
Posté le 07/01/2025 à 18h45
elouanr
Posté le 07/01/2025 à 18h45
Hello,
votre message me fait assez mal au coeur, j'avoue. Parce que vous avez l'air de quelqu'un de bien, de très sensible ( je n'aime pas le concept d'hypersensibilité, même s'il contient des choses réelles) et que vous avez l'air de souffrir au delà de ce qui est soutenable pour un être humain..
Ce que je lis, c'est un problème psychologique qui a sans doute des racines très profondes qui ne peuvent pas être explorées ainsi sur un forum. Si je vous posais les questions qui me viennent à l'esprit, je pourrais vous faire du mal, provoquer chez vous une attitude défensive, ou au contraire un complet shut down, et ça ne vous aiderait en rien.
J'ai envie de vous conseiller deux choses :
- chercher de l'aide auprès de psychologues pour vous aider à mieux vous connaître, mieux accepter qui vous êtes.
Vous pouvez aussi chercher auprès de psychiatres (les seuls qui sont habilités à faire un véritable diagnostic), mais en France, je doute que cela vous aidera dans un premier temps, sauf si vous trouvez un psychiatre faisant psychothérapeute en même temps. Je ne dis pas qu'un diagnostic serait inutile, des tas de problèmes de santé mentale peuvent créer cette hyper sensibilité. Ca va de l'autisme, au TDah en passant pa la bipolarité et le traumatisme. Et l'avis d'un psychiatre connaissant ces sujets serait intéressant, mais sans aide psychologique, peu suffisant à vous aider.
- Et justement, je vous inviterais aussi à vous renseigner à propos de tout ce qui est traumatisme et particulièrement de ce qu'on appelle le traumatisme complexe ( qui prend souvent sa racine dans la petite enfance). Pourquoi je vous parle de ça ? Je vous rassure, je ne pense pas que vous avez été violée ou gravement maltraitée par vos parents. Mais l'hyper sensibilité à l'injustice, aux violences, particulièrement celles faites aux plus faibles, est très souvent le fruit d'expériences personnelles dans l'enfance.
Ce que le grand public a encore du mal à comprendre dans le traumatisme c'est qu'il n'y a pas besoin d'évènements très graves comme une mise en danger, des violences sexuelles ou physiques... pour pourrir la construction d'un enfant et rendre sa vie d'adulte misérable. Une négligence émotionnelle peut donner les mêmes résultats ( vos parents sont sans doute des gens biens, ils vous ont nourri, logé, ne vous ont jamais maltraité physiquement, mais n'ont peut-être jamais écouté vos besoins de réconfort, de sécurité, d'amour inconditionnel, soit parce qu'ils avaient leurs propres soucis, soit parce que quelqu'un dans la famille les accaparait et vous laissait de coté... par exemple). La culpabilité (ou la honte) est bien souvent un symptome très parlant de tout cela... parce qu'un petit enfant ne peut pas comprendre que ses parents ne font pas ce qu'il faudrait pour lui. Que peut-il penser ce petit enfant ? que c'est de sa faute... et donc, devenu adulte, quand il commence à essayer à sortir de cet état d'esprit qui commence à lui jouer des tours (mais qui l'a aidé à affronter quelque chose de très difficile à vivre pour un enfant), il garde cette idée en tête. C'est de sa faute... S'il ne prend pas la défense des victimes, personne ne le fera, parce qu'il n'y a eu personne pour lui. De fait, il est responsable de la souffrance du monde entier. Et c'est invivable de vivre avec cette pensée... personne ne peut être responsable de la misère animale ou humaine à ce point. Vous le savez sans doute, d'une façon intellectuelle, mais dans votre tête, il y a encore cet enfant qui pense le contraire et qui vous donne toutes ces émotions si violentes parce que quand vous voyez un animal maltraité, au fond, vous avez une empathie extreme pour lui. Vous l'avez parce que, peut-être, avez vous vécu des choses difficiles, vous aussi, quand vous étiez aussi sans défense qu'un animal à l'abattoir. Et vraiment, il en faut peu pour un jeune enfant pour se retrouver dans cet état d'esprit... ce n'est pas forcément une maltraitance volontaire. Pour le comprendre, il suffit de songer qu'un nouveau né humain dépend entièrement de ses parents pour survivre, qu'il doit absolument se connecter à eux émotionnellement pour cela... il suffit de songer qu'un parent peut être malade, dépressif, absent ou peu disponible pour x raison pour comprendre l'impact de cette période sur un très un jeune enfant.
Hélas vous ne trouverez pas grand chose en France à ces sujets encore, mais il existe pas mal de ressources anglophones. C'est une hypothèse, un sujet à creuser, je pense. Je ne dis pas que c'est forcément ça, comme je le disais beaucoup de problèmes de santé mentale peuvent provoquer cette hyper sensibilité... mais ça vaudrait sans doute le coup de chercher à savoir d'où elle vient. Donc, sans jamais vous dire de négliger les autres hypothèses possibles, (qui peuvent d'ailleurs se cumuler...) parce que je ne suis pas là pour faire un diagnostic, la piste du traumatisme complexe me semble tout de même vraiment très intéressante compte tenu de vos propos...
Enfin, ne vous découragez pas si vous ne trouvez pas la bonne personne du premier coup. C'est compliqué parfois de dénicher l'interlocuteur compétent qui pourra nous aider. Si je prends mon exemple, 'ai des soucis physiques qui ne sont pas bien communs et j'ai galéré à trouver un kiné capable de m'aider, mais j'y suis parvenu...
Ne baissez pas les bras.
En tout cas, ne pensez pas que personne ne peut vous comprendre. Je n'ai pas votre hyper sensibilité sur ces sujets ( quoique, plus jeune, si sans doute...), mais je l'ai sur d'autres sujets. J'ai vu mon père l'être ( et, en effet, ça venait de son enfance qui, pour le coup, avait été vraiment violente) incapable d'accepter l'injustice faite aux autres, de la même façon qu'il était capable de se dénoncer pour une betise qui n'était pas de son fait, juste pour que son petit frangin ne se fasse pas battre par leur père... Des tas de gens sont ainsi. Certains en souffrent longuement, mais il est possible d'apprendre à apprivoiser cette sensibilité. Pas de la détruire, mais de ne plus en souffrir comme vous le décrivez... et si on n'y arrive pas seul, il ne faut pas hésiter à chercher de l'aide. Les professionnels que vous avez rencontrés ne vous comprennent pas car peu sont encore formés à ces sujets en France, mais il y en a de plus en plus... et il existe des gens capables aussi de s'adapter, même à un sujet qu'ils ne connaissent pas...
PS : vous noterez que je ne discute absolument pas de vos réactions, sur quelque sujet que ce soit, ou sur les choix qui y sont liés ( choix alimentaires, par exemple). Je pourrais très facilement, vu que je ne les partage pas forcément, mais s'il y a une chose à comprendre, c'est que ce sont des émotions que vous ressentez là. Les émotions, vous pouvez les intellectualiser, leur donner une forme raisonnable, mais ça reste des émotions. Du coup... on pourra vous aligner les meilleurs arguments du monde, il y a peu de chance que cela vous aide. Parce que, et j'ai mis du temps à comprendre et accepter ce fait, on ne règle pas un souci émotionnel par la réflexion... Un bon psychologue n'argumentera pas avec vous sur vos valeurs morales. Il pourra vous inviter à apprendre à moduler votre façon de penser, à être moins dans le tout noir ou tout blanc, mais ne devrait pas essayer de vous convaincre de changer de point de vue. Parce que le problème n'est pas là, vous êtes une personne intelligente et vous avez le droit d'être végétarienne ou vegan ou de ne pas vouloir faire telle ou telle chose. Le véritable problème c'est que, malgré tous ces choix que vous avez pris pour être en accord avec vous même, vous souffrez quand même...