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Posté le 17/06/2013 à 15h14
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Correction texte de Descartes
Le problème que se pose Descartes dans ce texte est le suivant : vaut-il mieux vivre seul ou vivre en société et que faut-il préférer ses intérêts personnels ou ceux du groupe ? Cette question est importante. En effet, nous pouvons parfois hésiter entre faire le bien d’autrui, penser à son bien propre ou satisfaire à ceux de la communauté. L’auteur du texte à commenter, répond de la manière suivante à cette question : « il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie, à ceux de sa personne en particulier, toutefois avec mesure et discernement ». En conséquence, ce qui importe c’est le discernement. Et comme nous allons le voir, ce discernement le pousse à affirmer même qu’en certaines occurrences, il vaut mieux sauver quelques êtres d’exception plutôt qu’un groupe qui n’en vaut pas la peine. Cette thèse est forte et originale mais qu’est ce qui motive et légitime une telle affirmation. Qu’est ce que Descartes appelle ici « discernement et mesure » ? Ce sont à ces questions que l’auteur s’efforce de répondre. Pour étayer sa thèse, il développe trois parties. La première se termine ligne 7 à « naissance ». Descartes développe ici ce qu’est l’homme pour lui qui ne peut « subsister » seul et qui n’est qu’une partie d’un grand tout. En conséquence, surgit la deuxième partie (ligne 7 à 12) qui constitue l’exposé de la thèse centrale de Descartes, si l’homme est partie d’un tout, il doit toujours préférer les intérêts de ce tout au sien propre non sans avoir fait attention, non sans savoir faire preuve de discernement. Pourquoi est-il préférable de ne pas tout rapporter à soi-même ? Descartes évoque ici ce qui est la vertu, sans ce choix préférentiel pour le groupe, aucune vertu ne serait possible (lignes 13 à 19).
Il faut à présent développer ces trois parties pour tenter de comprendre la thèse que soutient l’auteur.
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Qu’est ce que l’homme ? Est-il un atome séparé du reste de l’univers ? Est-il comme Hobbes l’a soutenu « un loup pour l’homme » et d’une manière générale quel est le rapport qu’il entretient avec le tout, à savoir le groupe, l’univers, la société ? Descartes répond à cette interrogation dans la première partie en nous indiquant que l’homme bien que séparé de tous ne peut subsister seul. Ce mot de « subsister » est important ici. Aristote avait fait, nous le savons dans son Politique I, de l’homme un animal social. La société faisait partie de sa nature. Il n’y a que les génies ou les êtres dégénérés qui peuvent vivre seuls pour Aristote. Descartes emploie ici à dessein le verbe « subsister ». Nous avons tous simplement besoin les uns des autres pour vivre. Cela ne signifie pas que tout est « commun ». Descartes ici ne plaide pas pour un communisme des intérêts et des biens. Il y a des biens privés et « les intérêts » personnels distincts de ceux du reste du monde existent (ligne 2). Cependant comme nous faisons partie d’un grand tout, il existe également des intérêts communs. Descartes ici reprend une distinction bien connue. Il rappelle qu’il existe deux types de bien, les biens propres et les biens communs. Il nous rappelle qu’il serait difficile de penser le propre s’il n’y avait du commun et inversement.
Les liens qui nous unissent à ce « tout » dont il décline la « liste » dans un ordre qui ne doit sans doute rien au hasard sont explicités dans ce moment du texte. Ce tout c’est la terre, « la partie de cet Etat, de cette société, de cette famille » (ligne 6). En conséquence, pour cet homme du 17ème siècle, il ne saurait s’agir de la société avec un grand S, de l’Etat avec un grand E et de la famille en sa totalité. En effet, à cette époque l’Etat ne se pensait pas un, ni la société ni les familles qui étaient fort
étendues. Le « tout » est un tout auquel nous sommes liés. Il est indéniable que nous sommes liés à la terre mais nous ne sommes pas liés à toute la société, ni tout l’Etat ni toute notre famille. En effet pour qu’il y ait lien il faut – et là aussi tenir compte de l’ordre qui établit sans doute une hiérarchie - que la relation soit celle de la « demeure, du serment ou/et de la naissance ». Je suis bien né sur cette terre et j’y demeure mais en quelle partie de l’Etat suis-je né ? Quel est le serment que j’ai passé avec cette catégorie ou telle autre ? Pour Descartes, il faut que l’un de ces liens soit présent qu’il y ait eu au moins serment, habitation ou naissance pour se sentir obligé envers le tout. Ces liens créent des devoirs mais lesquels et comment faire pour choisir et arbitrer lorsque les intérêts s’opposent ? Descartes répond à cette question dans la deuxième partie du texte.
Comment choisir et comment définir notre devoir, lorsque nous hésitons entre le bien privé, notre bien et celui du groupe ? Pour Descartes, aucune hésitation, aucun doute ne peut être admis : il faut toujours privilégier les intérêts du groupe et sacrifier les siens à ceux de l’ensemble. Une condition est requise, elle était rappelée dans la partie précédente, il faut qu’un lien de naissance, par serment ou de simple demeure existe. Ce choix pour le tout n’est cependant pas celui du sacrifice aveugle. Descartes ici le précise. Ce souci du tout doit toujours s’opérer avec « mesure » et « discernement ».
En d’autres termes, si nous devons toujours préférer le groupe à nos intérêts, il ne faut pas pour autant, comme la Bible dont Descartes demeure un grand lecteur soit oubliée, il ne faut pas être juste à l’excès. Ce souci des autres doit s’opérer avec « mesure ». Il faut toujours savoir raison garder. Il faut avoir du recul et apprécier chaque situation en tenant compte des circonstances. Pourquoi ?
Descartes répond ensuite, parce que l’ « on aurait tort de s’exposer à un grand mal pour procurer seulement un petit bien à ses parents ou son pays ». En effet, pourquoi se sacrifier inutilement ? Pourquoi donner beaucoup et perdre beaucoup si ce que nous faisons n’apporte que peu à nos proches, à ceux à qui nous sommes liés ? Il ne faut pas que la générosité à laquelle Descartes est très attaché, comme il l’écrira dans son traité des Passions, lui-même destiné à Elisabeth, se confonde avec le sacrifice ridicule, avec le don de soi qui n’amène à rien. Descartes rejoint ici Aristote. On peut être courageux et abandonner la bataille si la guerre est devenue vaine ou si elle porte atteinte aux intérêts du groupe. L’individu ne doit pas abandonner son jugement aux seuls intérêts du groupe. En d’autres termes, il doit savoir demeure clairvoyant. Cette clairvoyance est l’occasion pour Descartes de rappeler notamment que tous les hommes ne se valent pas : certains sont plus importants que le groupe lui-même. En conséquence le sacrifice des meilleurs est la pire des choses qui soit. Les hommes et les femmes d’exception doivent savoir qu’ils importent plus que l’ensemble. Pour Descartes, la qualité prime donc sur la quantité. Son individualisme n’est pas un égalitarisme aveugle et borné. Il a souci du bien et de l’homme de bien que Descartes place ainsi au-dessus du groupe. Pourquoi parce que l’homme de bien profite à tout le groupe alors qu’une association de malfaiteurs est toujours malfaisante, qu’elle soit en bande organisée ou pas, elle ne fait que le mal pour soi et pour l’autre.
En conséquence, le bien du groupe passe avant ceux de la personne mais tout dépend du moment, du groupe et ....de la personne. Demeure alors une dernière question, pourquoi cette préférence pour le tout ? C’est à cette question que s’efforce de répondre la dernière partie du texte.

Les intérêts du groupe – sous condition nous l’avons vu – priment sur ceux de l’individu car s’il en était autrement, la vertu ne serait pas possible. Comment en effet penser l’amitié, la fidélité et la générosité vraies si on ne pense qu’à soi, si les autres n’existent pas si nous ne faisons qu’oublier ce que nous devons à nos semblables et au groupe ?
Le souci de l’autre est la condition première de la vertu nous rappelle Descartes. En conséquence, lorsque nous nous rappelons que nous ne sommes pas que des êtres isolés, lorsque nous nous rappelons que nous faisons partie d’un grand tout alors « on prend plaisir à faire du bien à tout le monde et même on ne craint pas d’exposer sa vie pour le service d’autrui. (ligne 17). En effet nous savons que ce que nous avons fait fait plaisir à un ensemble auquel nous appartenons et en conséquence nous savons qu’en faisant plaisir au tout, en lui rendant service nous nous rendons service à nous-mêmes.
En conclusion, la pensée Moderne est souvent caricaturée. Il est souvent reproché aux philosophes de la Modernité d’avoir privilégié l’intérêt de l’individu au détriment de ceux du groupe. Nous voyons ici que Descartes montre qu’il avait souci du tout. Cependant il ne croit pas au sacrifice. Le discernement est toujours requis. Notamment l’individu d’exception doit savoir se préserver et ne pas se sacrifier à un groupe qui n’en vaut pas la peine. Qu’est ce que l’homme d’exception ici , celui qui fait le bien, qui le pratique en acte ; un bien qu’il sait commun et qu’il partage pour permettre à l’ensemble de grandir. L’individu d’exception ce n’est pas celui qui se prend pour le centre du monde, c’est au contraire celui qu’il fait partie de ce monde ; qu’il est « citoyen de cette terre » pourrait nous indiquer Descartes.