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Nos jardins de 2025.
Posté le 16/02/2021 à 21h33
gobi
Posté le 16/02/2021 à 21h33
Question existentielle du jour (venue pendant le désherbage) : qu'est-ce que c'est la permaculture ? ou plutôt qu'est-ce que c'est être "permaculturel"?
Comme tous les termes à la mode et qui définissent des "cases" ce terme me met mal à l'aise. Comme l'idée de "forêt jardin".
Y'a le beau : l'idée d'observer, de respecter la vitesse de la nature autour de nous, de prendre conscience de son abondance et de sa beauté, la sensibilisation aux mondes du vivant, aux écosystèmes... L'idée de créer des écosystèmes avec l'homme comme membre/acteur parmi les autres.
Et puis y'a des réalités auxquelles je me confronte : la vitesse (on investit un lieu, il faut vite tout mettre en place : quid de l'observation, de l'adaptation à une région, à l'existant), je sais que certains (beaucoup ?) ont un sentiment d'urgence mais quand ça fait des années que tu le connais ce sentiment, t'as un peu l'impression qu'on vient t'apprendre le fil à couper le beurre... Parce que y'a aussi l'idée qu'avec toutes ces infos collectées au cours de multiples recherches (démarche que je trouve plutôt chouette soit dit en passant) on accède au Graal, y'a un côté entrée en religion qui me met mal à l'aise. Ceux qui se revendiquent le plus de la permaculture autour de moi sont loin d'être ceux qui me font le plus rêver ! Trop de certitudes (ou alors trop de manque de confiance qui amène à marteler des infos comme de svérités absolues), trop de "il faut du local et du résilient" mais des commandes en masse via internet sur les sites de gros producteurs parce que c'est moins cher que nos pépinières locales Nature et Progrès, trop de com et de poudre aux yeux avec, pour certains, un beau fossé entre la com et la réalité... Et pour des gens qui revendiquent de créer de nouveaux vvre-ensemble, de nouvelles relations au monde une forte marchandisation du milieu, voire un appel aux dons y compris pour des propriétés privées (construire sa maison par ex) ou une double peine : tu payes ton stage et tu bosses à améliorer mon lieu de vie que je vendrai bien cher après (vu) ...
Et aussi : on parle d'apporter beaucoup de matières sur un lieu afin d'augmenter son potentiel de production. Moi je me demande à quel moment on dépasse le seuil d'équilibre : si on enrichit beaucoup une surface réduite, elle ne peut pas tout absorber (ni le sol ni les plantes qui y poussent), du coup, ça s'écoule, ça va dans les cours d'eau, ça détruit des écosystèmes. Qui tire la sonnette d'alarme ? Comment on se rend compte qu'on a atteint ce seuil de saturation ? Ce n'est pas que les engrais de synthèse qui polluent, l'excès d'azote et de nitrates même d'origine naturelle (animale entre autre) est un vrai problème. Alors à quel moment on est dans le juste, à quel moment on prend, sous une autre couverture, le même chemin que ce qui nous a amené là où on en est : la productivité à tout prix et quelque part, la rentabilité au mépris du vivant ?
Et enfin, l'apport massif et pas toujours réfléchi ni maitrisé de plantes du monde entier : bénéfice (augmentation de la biodiversité) ou impact négatif (fragilisation d'éco-systèmes déjà fragilisés par le dérèglement climatique) ? Bien sur que c'est le mode de voyage des plantes : utiliser un être capable de se mouvoir pour coloniser de nouveaux milieux, mais nos modes de vie et de voyage rendent les choses hyper rapides et massives (mode). Alors quand est-ce que ça devient (potentiellement) dangereux ? quels gardes fous on se met ? Quand est-ce que l'homme lache prise sur des milieux pour les laisser évoluer à leur sauce, à leur rythme, avec les aléas de leur vie ?
Ca m'interroge beaucoup ces limites, je me rends compte qu'elles sont hyper dures à poser et que comme tout phénomène de mode, la permaculture entraine dans son sillage, pour le meilleur et pour le pire, des gens qui ne questionnent pas un modèle mais veulent du prêt à consommer, du modèle applicable sans trop réfléchir...
edit : c'est ma manière de ce soir de réfléchir, vous poser tout ça en vrac, pas d'attaques de personnes, juste mes pérégrinations cérébrales du soir...