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Avis suite à discussion sur les mors
Posté le 08/04/2022 à 15h38
Je trouve l'article en lien avec le bit et briddle fitting super intéressant et surtout super juste.
Mon expérience sur le sujet : j'ai eu ma jument à 4 ans, elle en a maintenant 15. Et je suis passée par plein de mors différents, sur le plat à l'obstacle, parce qu'elle n'acceptait pas le contact, parce qu'elle me trimballait sur les barres, parce que ça n'allait pas. Et mon ancienne coach, plutôt que de chercher pourquoi ça n'allait pas, me hurlait dessus et m'a lancée dans une escalade de mors de plus en plus durs. J'ai terminé sur les barres avec un pelham sans alliances, rênes sur l'anneau du bas, gourmette à fond, muserolle combinée serrée au max (avec le recul aujourd'hui, je n'en suis vraiiiiiiiment pas fière).
Pour de multiples causes et une seule bonne raison, le bien-être de ma jument et donc, par conséquent, mon bien-être aussi, j'ai tout envoyé balader : ancienne pension, ancienne coach, anciennes habitudes bien ancrées après 25 ans d'équitation.
J'ai résolu les problèmes un par un :
1 - passer ma jument pieds nus : ferrée, même bien ferrée, passage du maréchal toutes les 4 semaines, ferrures à prix d'Américain..., ma jument se retrouve systématiquement avec P3 qui part en angle palmaire négatif. Seul le passage pieds nus lui permet de garder un pied fonctionnel. Avec P3 en bascule, antérieurs douloureux, impossible d'aller chercher du terrain avec les antérieurs donc impossible de pousser avec les postérieurs sous peine de forger et se toucher abominablement donc impossible de tendre le cheval, d'où des rétivités (refus du contact, headshaking, coups de cul...) puis boiterie. Pieds nus et P3 à la bonne place, miracle, la jument pousse, plusieurs défenses disparaissent (headshaking et coups de cul en particulier).
2 - changer l'alimentation de ma jument : je la passe d'une alimentation type granulés club + orge aplatie avec deux rations de foin par jour à un CMV sans céréales et trois grosses rations de foin par jour. Ma jument arrive à se servir de ses abdominaux (je ne pense pas qu'elle avait des ulcères mais il y avait certainement un inconfort gastrique lié à l'excès d'amidon de la ration et au manque de fibres). Ma jument accepte de s'arrondir sur le mors sans que j'aie cette sensation qu'elle le fait en se crispant et en se plaquant, je sens l'encolure s'arrondir vers le haut, plus de décontraction dans le bout de devant et surtout, le dos remonter sous mes fesses (à tel point que je passais mon temps à me retourner à cheval pour voir si elle était en train de crottiner !)
Ceci dit, malgré ces changements bénéfiques, j'avais toujours des soucis de contact (un peu lourd, un peu inconstant) et de gros soucis sur les barres qu'elle continuait de charger. C'est là qu'interviennent les changements suivants, quasiment en même temps.
3 - changement de pension : elle passe d'une pension box marcheur l'hiver / pré intégral l'été à une pension box paddock avec foin à volonté et copain l'hiver / box pré avec foin à volonté au box ou pré intégral l'été. Ma jument est donc plus disponible au travail car pas impactée par le manque de mouvement / contacts sociaux / fibres. Ca améliore encore un peu le travail.
3 bis - changement de coaching : je prends des cours une fois la semaine avec un coach BE1 et BFE1 formé chez Andy Booth. Et je crois que j'ai pris la plus grosse claque de ma vie ! On axe le travail sur deux choses : ma jument et moi reprenons les bases de l'éducation, un code = une réponse, chaque code doit être bien clair et bien séparable pour que ma jument comprenne parfaitement ce que je lui demande et surtout, je dois apprendre à réellement céder une fois que mon code a obtenu une réponse. Et ça, ça a été ma plus grosse prise de conscience. Je me suis rendu compte que malgré mes 30 ans d'équitation, je n'avais jamais compris ce qu'était réellement "céder", la descente des aides, et que j'étais accrochée comme une tique sur ma jument qui finissait par m'envoyer bouler sous tant de pressions continues bien qu'involontaires de ma part. J'ai passé un an, à pied comme à cheval, à rendre réflexe tous mes codes et surtout, à m'obliger à continuer de demander tant que je n'avais pas la réponse souhaitée et à céder immédiatement dès que je l'obtenais. Ca a donné des séances assez comiques durant lesquelles, par exemple, pour céder au mors, je tendais mes rênes et dès que j'obtenais la moindre cession, je relâchais mes rênes complètement, d'abord au pas, puis au trot, puis au galop. Puis une fois que tous les codes de base ont été fixés, les combiner petit à petit et obtenir une persistance des réponses en continuant à céder mais tout en gardant le contact, la communication, avec mes aides. Et là j'ai réussi à avoir une jument fine et légère.
La deuxième chose, ça a été de rassurer ma jument par rapport aux barres. Même si elle sautait, elle sautait en fuyant, dans la peur, car elle avait fait une association barre = pression (sur la bouche, sur les flancs...). Le déclic, ça a été quand mon coach m'a montré que si je lui laissais le choix, elle préférait contourner avec beaucoup de précautions tout ce qui pouvait ressembler de près ou de loin à une barre, même au sol. On a donc aussi mené parallèlement un gros travail pour la rassurer sur les barres : des barres au sol, des cavalettis, à pied, à cheval, avec pause et récompense systématique derrière chaque bon passage, avec l'objectif ultime que si je lui laisse le choix (en liberté ou à cheval rênes longues), ce soit elle qui décide d'aller passer une barre. Ca a pris un peu de temps mais aujourd'hui, on y est, elle choisit de passer les barres au sol ou les cavalettis si je lui en laisse le choix, en liberté ou à cheval. En revanche, dès qu'on monte les barres et / ou qu'on enchaine, je dois être extrêmement vigilante à moi, ma position, l'emploi de mes aides, pour ne pas lui remettre de pressions inutiles et la refaire monter dans les tours. Mais dans ces cas là, c'est un travail sur moi et pas sur elle.
Et le bit-fitting dans tout ça ? Je dirais que ça a été la cerise sur le gâteau. La recherche du mors qui serait le plus adapté pour communiquer au mieux avec ma jument et qui me permettrait d'appliquer au mieux tout ce que j'ai appris avec mon coach depuis deux ans maintenant. Et le résultat a été assez surprenant car moi qui était toujours allée vers des mors à gros canons et double brisure, ma jument a choisi un mors fin à simple brisure (plus précisément le demi Anky de chez Neue Schule). Avec ce mors là, j'ai eu l'effet Wahou (l'impression d'avoir une bouche en beurre au bout des rênes) et cet effet Wahou ne s'est jamais essouflé, grâce au travail mis en place à côté. Et moi qui avais une collection de mors assez impressionnante, je me retrouve avec mon petit "mors en or" et ma muserolle française qui sert plus à la déco qu'autre chose à dresser, sauter, balader...
Voilà, tout ce pavé pour dire que, à mon sens, le mors n'est qu'un outil de communication avec le cheval et que c'est top de s'intéresser à son adaptation. Mais je pense que ça ne sert pas à grand chose si on n'a pas un regard vraiment global et une approche réellement holistique de ce qu'on vit et ce qu'on fait avec son cheval. En toute logique, si le cheval a des conditions de vie adaptées à ses besoins fondamentaux et qu'il bénéficie d'une éducation qui lui permet de gérer les pressions qu'imposent l'équitation, les outils tels que le mors, l'ennasure, la selle... permettent plus d'affiner la communication que de résoudre des problèmes.