Parfois, je me dis que parmi ceux qui ont le plus besoin de bienveillance, ce sont les adolescents (qu'on prend au choix, souvent, ou pour des écervelés, ou pour des enfants grandis plus ou moins bien dressés). Je souhaite vraiment que la vague de questionnements sur le sujet aille jusqu'à leur âge et ne restent pas cantonnée aux très jeunes enfants (mais ces enfants vont grandir, et donc les parents qui se questionnent continueront à se questionner, donc je suis confiante

), et pas seulement aux parents (mais aussi à tous ceux qui interagissent avec eux).
De mon côté je ne peux te parler que VEO et incidence sur moi, en revanche je ne suis ni parent, ni éducatrice, ni psy, ni rien, donc j'ai bien conscience que mon point de vue n'est pas aussi poussé que si j'étais en interaction quotidienne avec des enfants, quel que soit leur âge.
J'ai été beaucoup frustré / agacée / mise en colère, enfant et adolescente, par des de des comportements de la part de certains adultes qui avaient manifestement un besoin d'asseoir leur autorité de façon peu plaisante (en grandissant, j'ai compris que ça cache généralement un manque de crédibilité et d'assurance, comme chez un manager). J'en avais déjà un peu conscience à l'époque et ils ne s'attiraient pas vraiment mon respect de cette manière. Je me suis toujours promis, enfant, puis adolescente, et je réitère ma promesse, de ne pas reproduire ces comportements sur les enfants ou adolescents que je serais amenée à croiser.
D'ailleurs je me suis déjà vue/entendue les pratiquer quand même : bah c'était des moments où je sentais mon "autorité d'adulte" remise en cause / décrédibilisée et où j'avais besoin de ça pour "asseoir" ma position d'adulte. Des moments de faiblesse de ma part, en fait, où c'était moi le problème d'ailleurs (manque d'assurance / choix que je ne voulais pas voir remis en cause / etc).
Parmi ces comportements que je ne souhaite pas reproduire :
- infantilisation, rabaissement par cette infantilisation, décrédibilisation du raisonnement de l'autre "parce que c'est un enfant", voire moqueries (je dis un truc à table, un adulte répond un truc que j'ai du mal à comprendre ou tourne en ridicule ma phrase, tous les adultes à tablent rient).
C'est pour moi représentatif d'un besoin de montrer sa supériorité d'adulte plus intelligent / instruit / etc, et même si j'ai conscience que les adultes agissent ainsi pour "réparer le fait qu'on leur a fait la même chose" et pour se venger de ça, je me suis dit que je pouvais essayer de faire cesser ce cycle où on humilie par petites piques les plus jeunes pour se venger de celles qu'on a prises à leur âge.
- l'obligation de contacts physiques (bisous notamment, mais pas seulement). Pour moi on ne peut pas à la fois dire à un enfant qu'il est obligé de faire un bisou / recevoir un câlin d'un adulte s'il n'en a pas envie parce que "c'est la famille", c'est "poli", et à la fois lui dire que parfois c'est un crime.
- le concept d'égal à égal, de respect, etc. C'est un truc qui m'a beaucoup marquée petite (vers 8-9 ans).
La maman d'une copine m'avait reproché de considérer les adultes d'égal à égal et donc de leur manquer de respect. Je lui avais répondu que j'avais appris à l'école que tous les humains naissent libres et égaux en droit, et sa réponse avait été très virulente (en gros j'étais insolente). Je ne comprends pas, toujours aujourd'hui, ce que ça veut dire. Etais-je inférieure à un adulte ? Est-ce qu'un adulte a le droit d'être davantage respecté qu'un enfant ? Chacun a le droit au respect, chacun a le devoir de respecter l'autre. Je m'y applique régulièrement, c'est un vrai rappel de me dire que cette personne en face, même plus jeune, ne m'est pas inférieure (ni supérieure), et que si elle doit me respecter, je dois également le faire.
- de façon générale, ne pas avoir conscience du développement du cerveau et de son fonctionnement, ou juste des cycles naturels de "vie". A l'adolescence, le cycle du sommeil se décale naturellement vers le "plus tard" (endormissement plus tardif, réveil également). De là ça aide à comprendre pourquoi les adolescents sont aussi décalqués le week-end (toute la semaine ils se sont "forcés" à se lever plus tôt que ce que leur cerveau leur ordonne, donc ils ont un décalage horaire à rattraper) et pendant les vacances (où on est davantage libre de se lever quand on le souhaite). Je ne dis pas là que j'encourage à accepter de se lever à 13h systématiquement, mais juste qu'en avoir conscience aide à comprendre les comportements.
De même j'ai eu un faible besoin de sommeil pendant toute mon enfance et au début de l'adolescence : notamment pendant les vacances, j'ai parfois été "forcée" de me coucher bien avant mon sommeil (si par miracle j'arrivais à m'endormir, j'étais debout à 5h, c'était pas bien non plus).
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globalement, je suis convaincue qu'apprendre aux enfants à respecter une règle par peur de la punition plutôt que par respect d'autrui amène à fabriquer des adultes qui ne respecteront la règle que lorsqu'ils auront un risque de punition. On ne leur a pas appris à favoriser le bien commun mais à éviter la punition, donc on fabrique des adultes qui dépassent les limites de vitesse "parce qu'il n'y a pas de radar", qui enfreignent le confinement "parce qu'il n'y a pas de contrôle", etc. Je me sentirai globalement plus à l'aise et en sécurité si je me savais dans une société où chacun privilégie le bien-être global avant de penser à la stratégie d'évitement de la punition. En vrai, davantage que l'amour des enfants (que je n'ai pas vraiment, en fait), c'est plutôt la volonté et l'envie d'une société comme celle-là qui m'anime

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