indji
ma réponse va être longue mais je pense utile de développer un peu.
Le seul fait de choisir à la place du cheval ce qui va l'occuper le temps de notre présence avec lui est déjà l'exercice d'une certaine hiérarchie. Quelle que soit la méthode choisie, éducation positive incluse. L'éducation positive, dans son fondement, inclus l'apprentissage de la frustration et du non. Mais cela ne doit pas faire l'objet d'un affrontement ou d'un autoritarisme. En EP aucune justification ne peut se résumer à "parce que c'est comme ça". Tout est source d'apprentissage, d'échanges, de décision collaborative... Il faut des raisons, de l'équité, du sens et que chaque partie en retire un enseignement positif sincère.
Avec les chevaux, il est possible de renoncer sans problème à certains objectifs immédiats ou à plus longs termes parce que le cheval envoie des signaux défavorables. Et cela sans renoncer à tout et tout le temps. Juste, avoir la capacité à ne pas aller dans le rouge, évaluer la zone de confort, la zone de progression et les limites à ne pas dépasser pour ne pas instaurer des rapports inacceptables. Pour moi c'est ça l'intelligence équestre et c'est ici que j'intégrerais une notion d'égal à égal. J'ai des mauvais jours pour X raisons, des choses que je ne veux/peux pas faire pour X raisons, j'accepte que ces éléments animent aussi les animaux qui m'entourent et je m'attache du mieux que je peux à en tenir compte. Comme on le fait entre humains civilisés. Ce n'est que de l'écoute en fait. Mais de la vraie écoute, celle qui tient compte des infos reçues pour rester dans le dialogue.
Même si cela insupporte certains de disserter sur la sémantique des termes, c'est pourtant utile de commencer par là pour s'accorder sur ce dont on parle
"Dominer" peut signifier bien des choses. "Imposer" aussi. On peut y mettre derrière de multiples nuances.
La domination chez les chevaux est plutôt l'exercice d'une priorité et non d'une violence physique ou mentale. Alors que chez les humains c'est tout de suite plus autoritaire et de fait, mal vécu.
La hiérarchie dans le troupeau c'est bien la mise en place
consentie par tous, d'un ordre de priorité pour telle ou telle activité, place, accès (tout cela était à géométrie variable en plus)... Chaque individu a vite "conscience" de sa capacité ou non à s'affirmer et quelques attitudes plus ou moins discrètes, mouvements ou grimaces pour appuyer cette assurance ou acceptation, suffisent largement et cela sans qu'aucune rancoeur, aucun vice, colère ou fâcherie n'en découle. Contrairement à nous qui avons le don pour le malentendu, l'interprétation, le roman-fiction, la rancune, la colère, l'énervement, l'acharnement, le machiavélisme, la disproportion, etc...
Un cheval dans un groupe est un cheval heureux même en étant au plus bas de son organisation hiérarchique
si sa place et celles des autres autour de lui sont claires.
A partir de là, avec un peu subtilité et de pédagogie, voire mieux : de pédagogie inversée permettent de conquérir l'intérêt du cheval. Si l’intérêt se confirme il débouchera vers de la collaboration. Que demander de plus.
Le cheval herbivore n'a naturellement aucun caractère vindicatif. Une fois le juste équilibre trouvé entre assurance et pédagogie, pas besoin d'aller au front pour éduquer, manipuler et dresser les chevaux. Pas besoin d'aller au front pour modeler les bons comportements, ceux qui nous arrangent, ni gérer et répondre à ceux qui ne nous arrangent pas.
Et tant qu'on n'attaque pas frontalement le cheval, lui ne le fera jamais. S'il le fait, ce n'est qu'en réponse à une erreur de jugement ou d'action de notre part. Proposer un bras de fer au cheval, c'est hyper binaire et ça ne débouche jamais sur rien de bon, même si parfois, durant un temps, certains y croient.
Ensuite, si je me place en situation d'urgence, celle où moi ou/et mon cheval courrons un risque grave et immédiat. Et que pour me préserver ou préserver mon cheval de ce risque grave, je dois agir avec brutalité, oui, je le ferais. Je préfère lui arracher deux dents en une fraction de seconde pour éviter que nous déboulions sur l'autoroute au galop, même si derrière je me jetterais à son cou en pleurant pour lui demander pardon ! Mais globalement, je dois quand même avoir tout fait au préalable pour ne pas me retrouver dans cette situation, mais bon, admettons....
Il m'est déjà arrivé de manquer de basculer en marche arrière dans un fossé par exemple, ou sur un cheval affolé par un oiseau droit debout au bord de se retourner, et j'avoue ne pas avoir fait dans le sentiment et sans regret. Mais j'ai bel et bien sauté à terre ensuite, en pleurs, et au cou de mon cheval pour lui demander pardon et le gratifier de mille réconforts. En même temps, ils s'étaient tellement fait peur l'un comme l'autre que je ne suis même pas sûre qu'ils aient réalisés que j'étais responsable du point final au combien douloureux mais salvateur ! En tout cas, aucun n'a montré de signes négatifs à postériori.
Montrer de l'assurance , de la fermeté parfois, de la détermination oui. Mais sans cohérence, bienveillance, gratification,écoute, intérêt, justesse, équité, subtilité, empathie,dialogue, ça ne fonctionne pas.