Ah ben dis donc, il ne faut pas s'absenter avec vous
Tout ça est très intéressant.
Quels sont justement les pistes de travail pour obtenir cette habituation aux éléments étrangers (tracteur, voiture, obstacles colorés, lice de dressage, passage des brosses, curage et ferrure) sans diminuer sa réactivité?
La piste c’est le temps et la patience.
Il faut exploiter les qualités naturelles du cheval, notamment, sa curiosité. Le jeune est très curieux, il n’a pas encore été inhibé. Il faut donc l’accompagner a découvrir les choses, en lui laissant le temps nécessaire, en lui montrant l’exemple car son instinct le pousse à imiter, en le récompensant.
Au début, les premières découvertes peuvent prendre beaucoup de temps. Il faut aller soi-même au contact des choses, pour montrer l’exemple, inciter l’approche par la voix et la récompense. Très souvent, si on touche un objet sur lequel le cheval montre de l’appréhension, il va à son tour venir au contact, la tension descend dès que le cheval éprouve l’inoffensivité des choses et cette preuve vient avec la prise de contact spontanée. C’est pourquoi il est important de laisser les chevaux aller d’eux-mêmes au contact et ne pas faire l’inverse : mettre l’objet au contact du cheval dans les premiers temps de l’éducation.
On récompense toujours la prise de contact spontanée. Au bout de quelques expériences heureuses, ça va aller beaucoup plus vite. Il a compris que la prise de contact était récompensée et que tout ce qu’on lui présente est inoffensif. On peut peu à peu diminuer voire supprimer les récompenses alimentaires, ne garder que les indications vocales. Contrairement à ce que certains peuvent craindre, l'autonomie pour gérer ensuite les appréhensions se met en place.
Il faut laisser autant de temps que le cheval a besoin pour regarder et sentir les objets, y revenir, longuement. Pareil sur les manipulations. On a tendance à vouloir aller plus vite, ne pas passer trop de temps pour ce que l’on considère être sans importance. Mais dans la construction de son apprentissage et sa confiance, pour le cheval, ceci n’a rien d’anodin. Si on l’aborde ainsi dès le départ, dès les premières interactions, on développe son envie de découvrir et sa confiance. Sans jamais avoir recours à la contrainte, ni à la force.
Si on reste dans cet état d’esprit lorsqu’on apprend au cheval à nous suivre en main, à bouger par des gestes plus que par des contacts physiques et que ces contacts physiques sont précis et délicats, on entretient la sensibilité et l’écoute. De fait, le moindre haussement de voix, va suffire à impressionner le cheval. On limite donc aussi l’emploi de punition physique. Ainsi, le terrain est préparé pour la partie montée : curiosité, confiance, délicatesse, attention.
Si on s’adresse au cheval dès le départ avec une voix basse et des contacts tactiles sans pression, il garde un seuil de réceptivité très fin en notre présence. Si on ne lui propose que des expériences positives, il développe sa confiance car on apparait comme une référence sécurisante. Il est loin d’être stupide et sait identifier ce qui est dans son intérêt. Il est toujours plus motivé si le contexte relationnel est agréable.
Mais du coup, pour dire que Poney n'a pas compris la demande à l'assiette, il n'y a rien à récompenser. comment lui expliquer ce qu'il doit faire? parce qu'un mouvement de bassin sur son dos ne veut pas dire "avance" en langage cheval instinctif
Ce n’est pas tant le mouvement du bassin qu’une logique d’équilibre qu’il faut rechercher et qui, elle, est instinctive.
Si tu as un sac à dos chargé sur tes épaules et que ce sac glisse d’un côté de ton dos, tu vas, par un moyen ou un autre faire en sorte de rééquilibrer l’ensemble. Si tu montes sur les épaules de quelqu’un et que sans rien lui dire tu tournes tes propres épaules d’un côté, il va s’orienter dans le même sens…
Les variations de ton poids, de ta posture, impacte naturellement les mouvements de celui qui te porte…
Avant de monter, tu as parlé pendant des années à ton poulain. Et lorsque tu l'a emmené en main, que tu as commencé à le longer, il a aussi appris à comprendre ta langue. Tu as mis des mots pour qu’il marche, qu’il s’arrête, trotte..etc… Tu as aussi utilisé des mots pour l’encourager lorsque tu le voyais hésitant vers une bonne réponse et des mots pour interrompre une mauvaise réponse…
Lorsqu’on monte pour la première fois, on n'ajuste pas les rênes

(on est censé être tenu en longe

). On serre un peu les fesses (la contraction des fessiers provoque une légère avancée du bassin), le dos est droit, le rein souple, les épaules s’ouvrent de façon à ce que les omoplates convergent l’une vers l’autre, ce qui fait monter le plexus solaire…Ces variations de poids provoquent chez le cheval, soit un pas, soit une tendance à aller en avant, on sent son poids à lui qui bascule sur ses antérieurs, et c’est cette sensation que la voix va encourager, féliciter jusqu’à à la marche.
Chaque allure du cheval initie un mouvement reconnaissable dans le bassin du cavalier. Pour obtenir l’allure qu’il souhaite, le cavalier doit donc mettre son bassin dans le mouvement correspondant, ceci provoque ce qu’on appelle « une appétence » pour l’allure correspondante, et si le cheval ne perçoit pas des mouvements contradictoires, il prendra cette allure. Idem pour l’arrêt : c’est « juste » le blocage des mouvements du bassin et un dos qui se tend et se fige. Ceci s’appelle l’isopraxie (mise en cohérence des mouvements). Ça c’est pour la partie naturelle de la mise en mouvement d’un cheval monté.
Pour la partie équitation, il faut ajuster les rênes, posé le couloir des aides entre les mains et les jambes et tout ce qui suit…..
La nature profonde du cheval n’est ni vindicative, ni violente. C’est un animal pacifiste, avide de sécurité, de contacts sociaux, d’apaisement, de cohésion de groupe, d’organisation claire. Sa relation au temps et à l’espace est tout à fait différente de la nôtre. Pour moi si on l’aborde on gardant tout ça en tête, on obtient des choses incroyables sans rapport de force, sans le confronter à l’inconfort pour un oui ou pour un non et surtout, il devient parfois une force proposition collaborative étonnante.