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Y aurait il une pénurie d’enseignants ?
Posté le 24/03/2022 à 10h44
Pour moi, au lieu de tirer encore sur les enseignants, il faudrait revoir le modèle équestre et la société en général.
Ça va faire 8 ans que je bosse dans le milieu et j'ai passé le BP il y'a 6 ans, en formation de 10 mois.
Clairement, ça n'a pas été une grande page de ma vie cette formation. D'un point de vue équestre, à part sortir les chevaux de formation, tu n'apprend rien. Alors que bon, je trouve ça primordial d'être bon technicien à cheval pour enseigner. Ya juste un cavalier de dressage qui nous encadrait qui m'a marqué.
Et d'un point de vue pédagogique, il en ressort la grande doctrine de l'équitation FFE , le cheval c'est trop génial. Vraiment jusqu'au galop 4 et un public jeune, il faudrait tout enseigner par le jeu. Aucune rigueur, que de l'animation... Franchement j'étais perdue.
Je me suis vite mise à mon compte en tant que cavalière et enseignante. Aujourd'hui je ne suis plus que cavalière jeunes chevaux hormis 2 clientes particulières en cours. Mais, j'ai également bossé en tant qu'enseignante dans diverses structures et auprès de pas mal de particuliers.
Niveau structure, il y'a une forte demande pour de la jeune population. Des gamines entres 5 et 12-13 ans environ. C'est 75% de la clientèle, vraiment. Du coup, les club ont surfé sur cette vague. Il est plus facile de monter un poney club avec une cavalerie composée de shets et poneys C-D. D'un point de vue coût, le budget entretien est moindre qu' une cavalerie de chevaux de selle. Et tu es sûre d'avoir tes 150 licenciés minimum sur l'année. Donc, on va développer l'animation ++ car ça rapporte. Et on aura des cavaliers ayant G4 maximum. Les structures le savent que c'est pas passionnant, que c'est pas de la grande équitation mais ça fait un sacré chiffre d'affaires.
Je me suis retrouvée dans ce genre de structures avec des gamines, qui viennent faire leur heure de poney comme elles iraient faire 1h de danse. Beaucoup cumulent x activités et ne sont pas passionnés par l'équitation. Ça leur occupe leur mercredi après midi. Il ne faut pas les secouer, il ne faut pas que ce soit trop dure. Même moi, qui suis technicienne et fais travailler même mes petits élèves, j'ai fini par faire de l'animation dans certaines structures. Car y'avait un fossé et ça ne collait pas.
Si tu te retrouves embauché sortie de diplôme dans ce genre de structure, je peux comprendre la demotivation. Tu te retrouves à faire que du tout petit niveau, répéter la même chose en cours G1, G1-2, baby's, Galop - 12...avec des cavaliers qui viennent juste se divertir 1h. Et le reste de la semaine, tu fais des scolaires. On est loin d'enseigner sa passion.
J'ai bossé pour des structures plus classiques, avec un bon enseignement d'équitation, cours compet, bons niveaux et là j'ai fais plusieurs années. Ce genre de centre trouvent généralement très vite des enseignants pour y bosser car les missions sont intéressantes.
Ya aussi un changement de mentalité qui s'opère. Aujourd'hui on ne veut plus sacrifier notre vie entière à cause du travail. Moi la première. Depuis cette année j'ai réussi à me débloquer mes week-ends et j'aurais dû mal à retourner faire des cours les samedis entiers. Pareil, je ne bloque plus qu'une à deux soirées par semaines de travail. Les structures doivent le comprendre et proposer des conditions où le moniteur s'y retrouve : 2 jours de repos, quelques soirées off, un ou deux dimanches par mois.
J'ai aussi développé les cours auprès des particuliers en tant qu'indépendante. Et franchement, je tire mon chapeau à ceux qui vivent que de ça.
J'ai eu de super couples à encadrer mais alors pour en vivre, c'est d'un compliqué. Aujourd'hui, j'ai même mis cette activité de côté car pas assez rentable et trop compliqué.
Souvent aux beaux jours, les gens sont sur motivés, l'agenda est plein. Il faudrait presque que tu modifies ta vie pour les encadrer x fois par semaine.
Puis, après ça annule à tout bout de champ. Il pleut, il fait trop froid, je suis fatigué, je vais me mettre en rando, c'est tout le genre d'excuse. Pour en vivre, ça en devient compliqué.
Pour moi cette partie n'a été qu'un bonus de salaire, mon argent de poche. Si je les ai, ça augmente mon confort de vie. Mais si je ne les ai pas, ça ne me pénalise pas.
Et le pire, comme soulevé plus haut par Urban, c'est la négociation non stop des tarifs. J'ai remis quelques annonces actuellement car j'aurais aimé consacré une journée par semaine de cours aux particuliers. J'ai eu beaucoup de messages, de demandes. La clientèle est là, mais alors elle ne veut pas payer. Je suis à 35€ la séance dans un périmètre autour de chez moi. Et je prend plus si plus loin. Et à chaque fois, on négocie, on me demande si je fais du dégressif, si je peux faire moins cher et j'en passe... A la fin, c'est usant. On ne s'est même pas rencontré, fais un cours d'essai que l'on cherche à tirer mon boulot vers le bas.
La majorité de ces personnes ne voudraient pas qu'on leur diminue leur taux horaire.
Donc les particuliers, j'ai freiné et c'est dommage pour les cavaliers sérieux. Mais je ne pouvais plus vivre de manière incertaine avec des gens qui annulent régulièrement et une demande low cost.