Bonsoir a tous !... un sujet qui me tien a coeur
Bonne lecture
Une des plus grandes difficultés que nous pouvons rencontrer pour comprendre le fonctionnement et les comportements du cheval réside dans notre façon de penser.
Nous pensons comme des humains, avec des notions typiquement « humaines », des critères propres à notre société occidentale actuelle et des valeurs issues d’un héritage judéo-chrétien européen qui a forgé notre manière de penser au cours des siècles.
Et très maladroitement, souvent nous avons tendance à attribuer au cheval un mode de fonctionnement qui ne lui correspond absolument pas et qui altère profondément la compréhension que nous avons de lui.
Chaque cheval est différent et les points d’observation sont innombrables et variables selon les individus et les situations.
Il est cependant primordial d’éviter tout anthropomorphisme dans cette étude du cheval que nous allons mener :
Pour que celle-ci soit juste et efficace, il faut éviter d’examiner les réactions et les attitudes du cheval en fonctions de nos critères humains car il y a des notions humaines qui n’ont pas d’équivalent chez le cheval.
Ainsi
un cheval qui chasse un de ses congénères parce qu’il veut garder toute la nourriture pour lui n’est pas « méchant » : c’est une attitude normale dans le monde animal qui obéit à la loi du plus fort, la loi du chef.
Dans la nature, la survie est essentielle. Les individus faibles sont éliminés ou relégués en position subalterne.
En revanche, un tel cheval nous permettra d’observer son caractère dominant, élément intéressant pour nous qui souhaitons travailler avec lui : notre attitude face à lui devra tenir compte de cette information qui est importante dans la mesure où c’est nous qui allons occuper la place qui est la sienne avec ses congénères.
Prenons comme autre exemple
la gentillesse au sens où nous l’entendons en tant qu’humain : un cheval avec lequel nous sommes « gentil » car nous lui donnons des friandises, et qui nous mord,
n’est pas « méchant », il est cheval et fonctionne comme un cheval. Il ne nous considère d’ailleurs pas comme « gentil »,
mot qui n’a pas de sens réel pour un cheval, mais comme un distributeur de friandises qui ne lui impose aucune limite, donc sans aucun positionnement déterminé.
Dans ce cas, il va agir comme avec ses congénères, de manière très « égoîste » (encore une notion parfaitement humaine), et
imposer sa volonté qu’il peut effectivement exprimer en mordant, comme il le ferait avec un autre cheval pour prendre sa place et accéder à la nourriture.
Dans ce cas-là, simplement frapper et chasser le cheval ne résout en rien le problème de fond qui est le positionnement que nous avons l’un par rapport à l’autre.
Si nous poursuivons notre vision humaine de la gentillesse, nous considérons que
la gentillesse appelle la gentillesse en retour. Quelqu’un de gentil est inoffensif, ne fait de mal à personne et permet d’offrir une présence agréable et sécurisante. Si nous sommes gentils avec les autres, les autres seront gentils avec nous également par charité humaine et éducation sociale.
Mais si cette idée de la gentillesse peut trouver une résonnance et parfois une réalité dans notre monde humain, elle ne correspond pas du tout à celui des chevaux. Pour les chevaux, le mot « gentil » n’a pas de signification. Un cheval n’est pas « gentil » au sens où nous l’entendons et il ne va pas être « gentil » avec nous par reconnaissance, parce que nous sommes gentils avec lui.
Un cheval fonctionne par hiérarchie.
Il est ou dominant ou dominé. Ce qui le préoccupe avant tout, c’est sa place dans un groupe pour savoir quelles sont les attitudes qu’il va devoir adopter ou quelle est la fonction qu’il va devoir assurer.
Il a besoin de savoir en priorité qui va le guider, le diriger et le protéger en cas de danger, quel est celui qui prend les décisions pour le bien de tous. Etre « gentil » avec un cheval ne lui suffit pas, il faut assurer sa protection et sa sécurité, donc être gentil, oui, bien sûr, mais surtout fort et solide.
Un cheval qui vide son cavalier à la moindre occasion
n’est pas « vicieux », il profite d’un moment de faiblesse, d’une faille de son cavalier, pour se débarrasser de lui.
Alors comment analyser cela ?
C’est pourtant clair : le cheval manifeste son désagrément, son inconfort, son désaccord par rapport au fait de porter quelqu’un sur son dos.
Evidemment, cela ne nous arrange pas vraiment car nous souhaitons monter ce cheval, mais son comportement est tout-à-fait « normal » pour un être vivant digne de ce nom et qui n’apprécie pas le traitement que nous lui infligeons, à savoir, monter sur son dos et vouloir l’utiliser à notre guise.
Alors que faire ?
Il y a deux solutions :
la plus courante, le soumettre, et donc « éteindre » et faire taire l’individu qui s’exprime ...
... ou le faire adhérer à l’équitation en modifiant le schéma mental qu’il en a, en lui faisant apprécier d’être monté, en lui faisant partager les activités équestres avec nous, mais cela correspond à une toute autre démarche qui prend en compte l’individu qu’il est, avec
respect et dignité.
Encore une fois, cela pose la question de nos valeurs et nous propose de faire nos propres choix en regard du statut que nous accordons aux animaux en général et au cheval en particulier.
Voici encore une notion très humaine,
l’envie de reconnaissance de la part du cheval, l’envie que le cheval agisse d’une certaine manière car nous lui avons accordé beaucoup d’attention, de soins, de prévenance, et malgré tout, le cheval nous ignore, ou s’en va et nous ressentons alors de grandes frustrations, voire un sentiment d’injustice, notion également parfaitement « humaine ».
Mais ce que nous avons apporté au cheval, il l’a certainement apprécié, et il l’a accepté avec plaisir, mais il est cheval avant tout, il ne va pas calculer son comportement à notre égard parce que nous lui avons accordé du temps et de l’attention, il ne nous doit rien. Et il n’est pas « ingrat » pour autant, il fonctionne comme un cheval.
C’est ainsi que certaine personnes attendent et espèrent que le cheval va les « aimer » pour elles-mêmes, comme le font les chiens.
Un chien est un chien, et un cheval est un cheval. Ce sont deux espèces différentes, qui ont des modes de fonctionnement très opposés.
Un chien s’attache inconditionnellement à son maître, et même si celui-ci est brutal et le frappe tous les jours, le chien, même malheureux, restera attaché à lui, souffrant de sa triste condition mais résigné à la fidélité.
Un cheval n’est pas un chien. Il peut s’attacher très fortement à un humain, mais contrairement au chien, cet attachement
exige du respect et de la constance de notre part. Il ne résistera pas à des « trahisons », à des sautes d’humeur, à des caprices, à des irrégularités de traitement.
Et il exige un investissement réel de notre part, un échange, un dialogue, pour nourrir et entretenir ce lien à la fois subtil et puissant qui va nous relier à lui.
Il ne faut pas attendre du cheval autre chose que ce qu’il peut donner. Et il peut donner énormément mais ce n’est pas lui qui demande et qui attend quelque chose de nous, c’est bien nous qui avons envie et besoin de lui.
Le cheval ne choisit rien, il nous subit. Nous l’avons acheté et nous décidons unilatéralement de son sort, sans lui demander son avis, et nous lui imposons notre volonté de manière arbitraire, en refusant toute manifestation de colère ou de refus de sa part.
Il est donc souhaitable, pour le bon fonctionnement du binôme que nous allons constituer avec lui, de faire l’effort d’essayer de le comprendre en tant que cheval, mais aussi individu différent qui doit s’adapter et vivre parmi les humains, ce qui n’est pas toujours facile pour lui.
Il y a ainsi un certain nombre de notions très « humaines » d’après lesquelles certains tentent vainement de comprendre les chevaux et qu’il ne faut pas hésiter à remettre en cause.
Pour comprendre comment se comporter avec un cheval, il faut apprendre et comprendre comment pense le cheval.
C’est nous qui l’invitons dans notre monde, il n’y est pas forcément à l’aise. C’est donc bien à nous de faire l’effort de nous adapter à son fonctionnement pour pouvoir ensuite lui expliquer le nôtre.