Ça y est, je suis de retour. Est-ce que j'ai lancé une discussion en ayant oublié que je ne serai pas là ? Pas du tout
lyzdekiel
Je comprend et ne t'oblige surtout pas
Perso, j'avoue que je remet "à sa place" sans trop de problèmes. Il y a des paroles que je ne peux pas tolérer et qui sont bannies chez moi. Si ça plaît pas à mon invité, c'est son problème, pas le mien. J'ai renvoyé dans les cordes suffisamment de mecs cis non-éduqués et de TERF pour ne clairement pas avoir peur de casser l'ambiance. Le gros avantage étant que j'ai un copain qui n'hésite pas à couper une tierce personne, ça m'évite d'avoir toute la charge éducative/casseuse d'ambiance.
Mon seul "défaut" en la matière c'est mon côté Amélie Poulain. Si quelqu'un dit une énormité raciste, misogyne, je vais d'abord me dire que c'est de l'humour avant de capter bieeeeen plus tard que la personne pense totalement ce qu'elle dit et après je ne sais plus quand réagir. Ça a dû créer de beaux quiproquos où l'autre devait penser que j'étais d'accord avec, alors que... Non
Là dessus, l'éducation familiale joue beaucoup. On a la culture du débat et aucun sujet n'a jamais été tabou, moi et mon frère avons toujours été encouragé à manifester nos points de vue et à les étoffer. Famille militante, je devais avoir 8 ans à ma première manif (le CPE) et mes parents tenaient à ce que je comprenne tout ce que cette loi impliquait. Ça surprend parfois les personnes extérieures à la famille car on peut passer 2h à débattre avec beaucoup de passion, quitte à faire grimper le niveau sonore, sur l'économie, la politique, le racisme, le sexisme... Même à Noël ou aux anniversaires. Il est toujours temps de débattre.
Dans la famille de mon copain, on ne parle pas politique. Il a été très surpris de voir qu'en 30 minutes dans la mienne, on est parti sur le sujet et qu'on peut y passer des heures, limite se foutre sur la gueule et estimer que c'était une chouette soirée !
Nan, le seul truc qui me fait peur c'est les militants.
Je supporte pas cette ambiance que je trouve totalement délétère à base de "on va y aller à 150 pour dire à Bidule qu'elle a utilisé un mot à tort" sur 40 minutes d'intervention. Je ne prend presque jamais la parole sur les RS, ou avec un gros stress, sur les sujets militants, tellement j'ai l'impression qu'il faut tendre à une perfection permanente. On a beau dire "il faut deconstruire le sexisme, le racisme, le validisme...", on ne permet pas vraiment aux gens de ne pas être totalement éduqués et s'ils font une erreur, c'est parti pour le bordel...
Je ne suis pas vraiment d'accord non plus avec l'assertion "les concernés d'abord", ça dépend du sujet. Ni avec la culture du call-out. Dans l'idée, le call-out a une potentielle utilité, mais dans les faits... J'ai vu des gens se faire balancer car... Pas au point sur les tâches ménagères. J'en ai rien à foutre que Dudu ait pas fait la vaisselle chez 4 personnes. Et la manière d'utiliser le call out se met souvent en franche opposition avec la notion de justice réparatrice que tout le monde brandit. Je trouve le concept absolument génial et j'ai pu rencontrer plein de victimes, comme moi, qui aimerait que cette justice existe. Mais on ne la permet pas.
Je trouve le milieu militant violent, tout simplement, et particulièrement en interne. J'ai plus peur des gens de "mon camp" que des gens qui me détestent car femme queer handi
Dernièrement un gamin a voulu, je suppose, me blesser en m'envoyant ce qu'il pensait être un taunt sur mes prises de médicaments. J'avoue que j'ai regardé ça avec la même émotion que mon chat devant un jouet poisson : "ça s'agite mais j'en ai rien à foutre, je ne comprend même pas le but de la manœuvre".
Donc je ne m'engage jamais vraiment, ça m'évite des prises de tête inutiles. En tout cas pas en groupe sur le terrain des idées. Je gravite autour et ne prend la parole que dans un cadre safe ou si j'estime que ce que j'ai à dire peut être intéressant.
Je ne me sens donc pas en décalage avec les hommes alliés qui n'osent pas prendre la parole ou se sentent à risque de le faire. On le leur demande beaucoup mais quand ils le font, il y a TOUJOURS quelqu'un pour demander s'ils veulent un cookie ou pour leur dire de ne pas prendre la parole des concernés. Faudrait savoir...
En tant qu'ancienne victime puis aidante auprès de victimes, mon principal cheval de bataille ce sont les violences sexuelles. Je me renseigne énormément dessus, je me met à jours... Si ma dernière expérience ne s'était pas transformée en baroud d'honneur, j'aurai peut-être continué à parler avec des anciennes victimes jusqu'à trouver un angle d'attaque pour monter une asso ou que sais-je. Ma santé mentale m'a clairement exprimé le faut que j'étais allée trop loin pour mes propres limites, ça ne se fera pas. Je le ferai pour mes très proches mais pas plus... Mais je prépare tout un récit sur cette expérience et ce que j'en ai ressorti. Le truc qui me bloque ? Cette même peur. Je sais d'avance qu'on va me faire chier et me tomber dessus, potentiellement en masse, car j'ai très envie de mettre un coup de pied dans la fourmilière.
Ça, ça date de ma décennie punk dans les squats et sa philosophie DIY : "si ça n'existe pas, fais le toi-même".
Je vais clairement bien m'entourer... Et ça m'amène à la création qui est quand même mon métier. Pour le court-métrage sur lequel j'ai travaillé, on ne prenait beaucoup de risque niveau racisme. La personnage principale est racisée. C'était facile de tomber dans un cliché raciste donc facile d'en sortir. Bien qu'on nous ai dit que choisir une peau foncée c'était pas facile techniquement et qu'une blanche serait plus simple... Ça m'a choqué, honnêtement. Plutôt qu'apprendre tous à gérer les peaux noires, métis etc... On préfère se cantonner aux seules peaux blanches car "plus simple". C'est pas plus simple, les peaux reçoivent toutes la lumière de la même façon, il faut apprendre à les gérer, c'est tout.
Mais sur mon gros projet perso, je suis face à un écueil. Mes personnages sont pour beaucoup mauvais et pas politiquement correct, colériques, manipulateurs
(oui je pleure des larmes de sang sur mon scénar avec ces personnages). Un de mes personnages principaux est une femme noire. Je tenais à ce que ce rôle soit investi par une femme et je n'avais aucune raison de la faire blanche... En tant que femme blanche, elle serait juste badass, on est dans la logique de la femme qui veut son indépendance et qui fera tout pour se soustraire à la domination. Mais une fois noire, est-ce qu'elle ne correspond pas au cliché de la "femme noire en colère" ? Je crains que si. Est-ce que je vais en faire un homme noir ou une femme blanche ? Non. J'aime ce personnage, j'aime le fait que ce soit une battante, que son histoire, dépendante de sa couleur, justifie sa recherche de liberté à tout prix, même en la monnayant à prix fort.
Donc non, ce ne sera pas une histoire parfaite. Et les histoires parfaites me font chier... J'ai essayé de regarder Heartstopper, la série queer à succès. C'est, militantismement parlant, "parfait". Et ben c'est niais et chiant, j'ai l'impression qu'on me vend du queer baiting même pas subtile. Dès les 5 premières minutes c'est le jackpot : deux personnages qui parlent de Bidule qui a fait son coming-out transgenre mais a changé d'établissement car la directrice le mégenrait et a utilisé son deadname... En DEUX phrases... Super, on joue au scrabble, en fait, faut sortir le plus de mot "woke" à la minute. La subtilité, c'est pas pour les tapettes, apparemment.
Et je me permet de dire "tappette" car quiconque traîne sur le FA sait où je me situe en la matière. Ya un gros drapeau arc-en-ciel sur ma fenêtre.
Pour le reste, même avec mes écueils et méconnaissance, j'essaie juste de m'aligner avec moi-même. Je ne vais pas investir une notion qui m'est inconnue ou essayer de tout lire sur tous les sujets en un temps record pour être parfaite. Je ne le suis pas, je pense que je m'améliorerai toute ma vie... J'ai fait des erreurs, j'en referai sûrement, j'essaie d'apprendre d'elles pour ne pas les reproduire.
L'avantage (si, si) d'être tombé sur des cas, c'est que ça m'a quand même amené pleins de trucs. J'ai l'énorme chance d'avoir des capacités de résilience assez performantes. J'ai eu droit au pédocriminel, au conjoint toxique et violent moralement, un one-night devenu manipulateur, aux violences intra-familiale... Je me suis remise de tout. Du coup j'ai quasiment pas peur. J'ai eu une très large majorité de relations très chouettes, les autres sont comme des erreurs de parcours, des statistiques... Comme une loi des probabilités. Ça m'a appris à percevoir le danger, comme dit ma psy "c'est quand on a été au contact étroit de ces gens qu'on les reconnaît et qu'on a une alarme", mais à garder la pleine maîtrise dessus Et je crois que je préfère avoir vécu ça que rien du tout. C'est presque instinctif, maintenant, et je ne me trompe presque jamais. Si j'écoutais moins mon côté Amélie Poulain
En un sens, c'est presque une chance (presque et je dis ça uniquement car, pour une raison que j'ignore, je me remet de tout) autant pour moi que les autres. Quand je parle avec un•e autre victime, iel n'a pas besoin de m'expliquer les mécanismes etc... Je le sais et on se sait. Et la littérature n'a jamais réussi à bien les expliquer. J'ai pas besoin de me prendre la tête sur ce qu'il faut dire et ne pas dire : c'est tout aussi instinctif. Face à la culpabilité, au "j'aurai dû/ j'aurai pas dû...", pas besoin de poncif à base de "c'est pas ta faute, je te crois". On s'en fout : tout internet le lui dit, si cette personne parle à une inconnue, c'est que ça ne suffit pas de lire des slogans. Et je pense que l'avoir vécu dans sa tête, dans sa chair, c'est ce qui permet de dégager les slogans tout-fait pour ne pas lire/entendre une énième histoire de violence mais voir/écouter une histoire singulière et unique. Et amener l'autre à aller voir des gens réellement compétent (psy, asso...) qui sauront voir l'unicité de cette personne et de son histoire.
Alors en un sens, je suis contente que certains aient essayé de me broyer. Déjà, ils n'ont pas réussi. Et au moins, ça a servi à quelque chose.
eric61
Citation :
Tous les chiffres que vous balancez ici concerne déjà le passé, la génération qui arrive ne rentre pas encore dans ces chiffres.
Parce qu'ils ont entre 4 et 14 ans. C'est logique. Le "passé" se sont les adultes actuels dont les très jeunes mais aussi les dinosaures qui n'écoutent rien et n'évoluent jamais. Dans ma génération on les appelle des Boomer dont la définition a opéré un glissement de la génération du baby-boom, au fait d'être obtu et convaincu de leur supériorité par le seul âge/genre/whatever. Et on leur dit souvent "OK"