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Posté le 09/05/2014 à 00h07
Seconde partie du premier chapitre, histoire de dire qu'il a été posté au complet. La longueur en décourage beaucoup, c'est compréhensible, mais je vous invite en page 1, à lire le début.
Le baron se leva, et le serviteur tira la chaise pour qu'il puisse sortir aisément de sous la petite table. Depuis qu'il était assis, la jeune femme n'avait pas pu correctement le juger. Il n'était pas d'une très grande taille, ni très beau. Il avait un nez plutôt droit, mais se terminant avec deux grosses narines, dont les poils semblaient vouloir en sortir. Ses lèvres étaient fines et clairs, on pourrait croire de loin, qu'il n'en n'avait simplement pas. Ses cheveux, sûrement châtains dans le temps, étaient blancs sur une bonne partie du crâne, là où il y en avait encore. Il les avait tirés et attachés en une queue de cheval basse, noué d'un ruban de satin noir.
Ils descendirent tous les deux l'escalier emprunté auparavant par la jeune femme, mais au lieu de sortir par la porte d'entrée, il lui fit prendre une porte plus petite et discrète, présente au fond du hall. Ainsi, elle se trouva au milieu de la cuisine, ou deux femmes s'activaient déjà pour le repas de midi. L'une plumait une poule alors que la seconde épluchait des pommes de terre grosses comme des pommes. La vue de la nourriture fit gargouiller vivement son estomac, et elle serra les dents. Ils finirent par sortir à l’extérieur en prenant une large et lourde porte.
« -Cependant, j'ai une question Baron...
Celui-ci ne se tourna qu'à peine, continuant son chemin à travers les jardins.
-Bien sûr. Quelle t’est -elle donc ?
-Pourquoi m'avoir demandé moi ? Ce sont les mages et les sorciers qui s'occupent des créatures magiques. Très certainement pas les chasseurs de primes.
Le baron s'arrêta, juste à côté d'une petite fontaine où des créatures maritimes crachaient de fins filets d'eau. Il la regarda sévèrement.
-Vous avez donc une si maigre opinion de vous-même ? J'ai entendu dire qu'une célèbre chasseuse de prime, une tueuse à gage se trouvait dans la région, et qu'elle savait par ailleurs manipuler l'Énergie. Pourquoi devrais-je attendre que notre Glorieuse Reine ne m’envoie un de ses mages personnel, ce qui prendrait plusieurs mois, alors que vous êtes déjà là ? De plus, ce n'est qu'un simple Lindworm, rien de bien méchant. Il la regarda de façon moins stricte. Et puis, vous serez bien payé, je peux vous l'assurer.
-Bien. Puisque vous abordez vous même le sujet. Elle s'assit sur le bord de la fontaine. Ce geste, agaça visiblement le baron. Normalement, pour une créature, je prends au minimum deux cents deniers d'argents. Mais sachant que vous m'avez personnellement fait venir ici, j'en demanderai trois cents.
-Je vous n'en donnerai pas plus de deux cent cinquante, dit-il fièrement.
Huyana esquissa un sourire mauvais, tout en jouant du bout de ses doigts avec l'eau.
-Nous verrons cela. Je veux d'abord voir ces fameuses empreintes. Je jugerai peut-être bon de baisser mes tarifs.
Le baron se trémoussa puis reprit son chemin, sans un mot supplémentaire et silencieuse, Huyana le suivit. Les jardins étaient agréables, l'herbe verte et douce crissaient sous ses pieds, les hais des petits labyrinthes lui arrivait à la mi-cuisse et de nombreuses fleurs ainsi que des glycines étaient plantés, décorant de milles couleurs l'environnement. Il n'était pas très grand, mais le tout formait un cadre très appréciable. Ils finirent par quitter les jardins, et suivirent un chemin un peu plus incertain, à la lisière d'une grande forêt de conifères, celle-ci même faisait le tour de la ville et des champs.
-Nous y sommes. Le baron ouvrit un tout petit portail de bois blanc, très simple, et la jeune femme le franchit, puis retint son souffle.
-C'est ici ? Dit-elle.
-Oui. Vous ne voyez pas ? Partout la terre est morte. La plupart des arbres ont crevés, et la terre est totalement retournée sur cette partie.
Et il avait raison. Tout autour du trou creusé dans la terre, dans un diamètre de dix toises, l'herbe était marron et séchée, les arbres touchés par le cercle, eux, étaient morts. Il avait perdu leurs feuilles, comme en hiver, mais en plus de cela ils étaient noircis, et leurs branches n'étaient plus droites. L'on avait l'impression qu'ils allaient s'écrouler d'un instant à l'autre. De plus, une odeur de soufre planait dans l'air.
-Oui, je vois cela baron. Mais je ne vois pas de traces de pattes. Tous les Lindworm en ont. Ce n'est pas normal. Huyana se baissa, puis posa sa main sur la terre séchée. Vous savez baron, j'ai deux mauvaises nouvelle à vous annoncer. Elle lui jeta un œil tout en faisant une pause. La première, reprit-elle, c'est que je ne vais pas baisser mes tarifs. Au contraire, je vais les augmenter. (Le baron soupira.) La seconde, c'est que ce n'est pas un Lindworm qui a traîné ici. La jeune femme se leva puis regarda le serviteur, plusieurs pas derrière eux. Vous savez Gérald, vous êtes chanceux. Vous avez survécu après avoir croisé un basilic !
Au loin, ils virent le serviteur s'écrouler au sol, après avoir tourné de l’œil. Le baron observa sans bouger la scène alors que la jeune femme haussa les sourcils.
-Ne vous inquiétez pas. Cela lui arrive souvent. C'est un bonhomme sensible. Même lorsque l'on fait des blagues de ce genre...
Huyana regarda d'un œil de pierre le baron.
-Ce n'est pas une blague. Un basilic est bien passé par ici il y a trois jours. C'est d'ailleurs un miracle qu'il n'est tué personne pour le moment.
-Et à quoi voyez-vous cela, je vous prie ?
-Là. C'est bien votre mère ?
La jeune femme pointa du doigt une forme inerte et indistincte au fond du trou. On apercevait la tête séparée du corps et le torse ouvert par de puissants coups de dents ou de cornes. Une odeur nauséabonde s'en dégageait. Le baron se pencha légèrement, puis recula promptement, un mouchoir sur le nez, visiblement sur le point de vomir. Il haussa la tête quand il vit que la femme attendait une réponse.
-Il ne l'a pas dévoré. Tout simplement car ce n'était pas son objectif. Il n'a que faire des cadavres, mais il a du sortir de terre sûrement pour chasser un peu. Et manque de bol, il l'a fait ici. Vous avez eut des plaintes de paysans dernièrement ? Des enfants disparus ? Des femmes qui ne laissent pas de traces ?
Le baron secoua négativement la tête, le mouchoir toujours collé sur le bas de son visage, son front brillant et moite.
-Et des coqs retrouvés morts ?
Le baron s'apprêta à secouer de nouveau la tête, mais il s'arrêta net. Il retira le mouchoir et regarda, les yeux remplit de peur, Huyana.
-Je crois...Oui. J'ai entendu des gens se plaindre hier, quand je suis allé au marché...Oh misère....Oh misère...Un basilic, ici...Oh...
Le baron tremblait de tous ses membres et dût s'appuyer sur une pierre tombale d'un blanc sale pour ne pas tomber.
-Monseigneur, je pense qu'il vaut mieux envoyer une missive à la Reine, et ce, au plus vite. Vous aurez sûrement une réponse positive et un mage d'ici une dizaine de jours.
Le baron étouffa un sanglot muet et faillit s'étrangler.
-Dix jours ? Dix jours ? Miséricorde, en dix jours, il pourrait déjà y avoir des morts !
Huyana se planta devant lui, alors qu'il s'assit, pâle comme un mort, sur la pierre tombale, sûrement celle d'un cousin éloigné.
-Vous avez un puits dans le village ?
Le baron redressa la tête, le souffle court.
-Oui. Un seul, peu profond. Les rivières aux alentours sont nombreuses.
-Fermez-le. Le basilic, s’il est toujours ici, risque de contaminer l'eau. Demandez à la population de s'éloigner des points d'eau stagnants aussi. Et bien sûr, de rester chez soi durant la nuit.
-Et ceux qui n'ont pas de chez eux ?
Huyana le jugea d'un air sévère.
-Les dommages collatéraux sont nécessaires. Ce sera un gueux qui mourra au lieu d'un enfant ou d'un travailleur.
Le baron la regarda avec des yeux ronds et remplit d'effroi. Ses lèvres tremblaient, et on avait l'impression qu'il tentait de dire quelque chose. Patiente, Huyana attendit.
-Et...Et vous ne pouvez rien faire ? On m'a dit que vous manipuliez l'Énergie !
-Au premier degré oui ! Seulement au premier degré. Pratique pour faire des soins, ou pour retirer des maux d'estomacs, mais ça s'arrête là. Je peux éventuellement former une sphère de feu pour mieux y voir, mais c'est tout. Je ne suis ni mage, ni sorcière. Envoyez une missive, monseigneur.
Tout tremblant, le baron se redressa, tout en essayant de retrouver sa prestance et sa tenue.
-Gérald ! (Sa voix fut faiblarde et tremblante. Il toussota pour essayer d'arranger son timbre.) Gérald ! Debout !
Le serviteur, comme un chien appelé par son maître, se réveilla, sortit de sa torpeur. L'évanouissement était derrière lui, et rapidement, il se mit debout et accourut auprès du baron. Il était lui aussi pâle et faible.
- Écoute-moi bien. Envois au plus vite une missive par messager à notre Glorieuse Reine, lui demandant de toute urgence son aide, pour occire un basilic. Utilise mon cachet (il retira une large chevalière de son majeur gauche) et imite ma signature, je te fais confiance. Puis, tu ira faire imprimer des annonces pour la ville, et tu demanderas à Gilles et à Maria de les afficher rapidement. Dedans, tu mettras que l'accès au puits est désormais interdit jusqu'à nouvel ordre. Qu'il ne faut pas s'approcher de l'étang et du marais, et qu'il ne faut pas rester dehors lorsque le soleil sera couché. Met qu'il y a une suspicion de basilic dans la région. Met en évidence les mots suspicion et région. Que les gens ne paniquent pas trop. Puis tu engageras les hérauts qu'ils crient la nouvelle. Compris ?
-Bien sûr monseigneur.
-Alors vas !
Le serviteur s'inclina bas, puis se retira, toujours en trottinant d'une façon étrange. Il ne courait pas, mais, il allait plus vite que lorsqu'il marchait. Remarquant le regard fixé sur Gérald, le baron crut bon s'expliquer.
-Il a une jambe bien plus courte que l'autre. Il boîte.
Huyana le quitta des yeux, puis observa le baron. Il avait repris une teinte rouge qui semblait être son teint naturel.
-J'ai confiance en lui, cela fait cinquante ans qu'il vit ici, il m'a vu naître. C'est un homme bon.
-Je n'en doute pas une seule seconde.
-Y a t-il un espoir que...le baron hésita à nouveau. Que le basilic soit parti de lui-même ?
-Oui, c'est possible, dit-elle, en posant ses mains sur les hanches. Mais elles sont minces. S’il a tué les coqs c'est qu'il est désireux d'établir son territoire ici. (Le baron soupira bruyamment.) Je suis désolé d'être porteuse de si mauvaises nouvelles ; j'aurai moi aussi aimé qu'il s'agisse simplement d'un Lindworm.
-Et vous, il cligna lentement des yeux, et vous, vous ne pouvez rien faire ?
Huyana haussa un sourcil, puis réajusta sa longue queue de cheval, sur le haut de son crâne.
-Si. Vu la largeur du trou, il est encore jeune. C'est sûrement pour ça qu'il cherche un lieu où il pourrait s'installer. Mais même un jeune...Je risquerai ma vie, et mes chances de m'en sortir sont minces. Cependant, si vous insistez, je peux attendre avec vous l'arrivée du mage. Et si le basilic se présente avant, je tenterai quelque chose. Cependant, ce ne sera pas donné. Elle jeta un œil au baron. Vraiment pas.
Résigné, l'homme soupira à nouveau. Ses épaules, droites la seconde précédente, venaient de s'écrouler.
-Dites votre prix.
-Cinquante deniers d'or, monseigneur.
-Cinquante ?! Il devint à nouveau pâle. Mais c'est une véritable fortune !
-Mais non monseigneur. Puis il y a peu de chance que je m'en sorte vivante, vous n'aurez peut-être pas à dépenser un seul sou. Mais n'oubliez pas, je reste tout de même ici une dizaine de jours, ma bourse est vide, et pendant que j'attends, j'aurai très certainement pût me faire de l'argent ailleurs. Mon prix est honorable.
-Cela va sans dire. Je suppose que je devrais vous loger ?
Huyana joua avec la terre du bout de son pied, puis observa de nouveau au fond du trou.
-Non, ce ne sera pas nécessaire. Je patrouillerai la nuit, et le jour je dormirai quelque part. Cependant...J'avoue que je n'ai rien mangé de consistant depuis des jours.
Le baron la regarda de la tête au pied. Il était vrai qu'il était habitué aux femmes voluptueuses et bien bâties, aux hanches larges et à la poitrine accueillante. Pourtant, la femme présente devant lui était mince, élancée, et féline. Sa poitrine, était cachée par un épais gilet de cuir et une petite côte de maille. Ce n'était pas son type de femme.
-Venez. Je vais vous accompagner aux cuisines. D'ici une heure ou deux, nombreux habitants vont me demander des explications. Et vous serez présente aussi, vous les rassurerez. En attendant, restaurez-vous, vous êtes maigre comme un clou.
-Vous êtes trop bon monseigneur. »
Le baron était anxieux, et il ne répondit rien, se contentant de lui ouvrir les portes de la cuisine, d'aboyer quelques ordres, puis de la laisser là.
Celle-ci, peu gênée par les œillades inquiètes que se lançaient les deux servantes, piocha une pomme verte dans un saladier, et croqua à pleine dents. Le jus coula sur ses lèvres et elle l'aspira avant de mâcher le morceau. La chair était fraîche et croquante, le goût sucré et acide, le tout rentrant dans une symphonie papillaire. Elle ne laissa qu'un maigre trognon qu'elle jeta sur les épluchures de pomme de terre, à l'autre bout de la pièce. Surprise, la servante sursauta, puis lui jeta des éclairs. Elle dévora ensuite divers morceaux de salaison ainsi que du pain, et ce, durant de longues demi-heure. Plus elle mangeait, plus les servantes se regardaient, inquiètes. Alors qu'elle commençait à vaguement fouiller un sac de toile remplit de tommes de chèvres, un serviteur, autre que Gérald, entra brutalement dans la cuisine par la porte du hall. Il scruta la pièce, puis sans attendre, il se dirigea vers Huyana, négligemment posée sur une table, une jambe pendant dans le vide alors que l'autre était croisée sur sa cuisse. Voyant le serviteur, elle enfouit une pomme dans la poche de son gilet et goba tout entière la petite tomme ainsi qu'une bouchée de pain.
« -Le baron vous attend...ma...ma Dame.
La bouche pleine et les joues gonflées, elle se contenta de hocher la tête, le tout en mâchant avec difficulté. Elle suivit le serviteur, qui, contrairement à Gérald, se tenait droit, et ne boitait pas. Il devait avoir entre trente et quarante années, mais la calvitie l'avait déjà rendu à moitié chauve. Huyana avala d'un coup lorsqu'elle franchit la porte de la cuisine et entra dans le hall d'entrée. Cette fois-ci, elle ne monta pas les escaliers, mais elle tourna à gauche, et entra dans une large salle au mur vert émeraude. Un large et splendide lustre pendait du plafond, les cristaux et le verre blanc et opaque tintant sous la douceur des courants d'air. Sur le sol, un large et épais tapis en points de croix masquait la majeure partie du parquet de hêtre. La salle était longue, et une grande table où pouvait s'asseoir une trentaine d'invité était en son centre. Contrairement à l'étage, l'on sentait ici l'importance et le sérieux des réunions qui avaient lieu.
Le baron s'était quant à lui, changé. Il avait laissé de côté son manteau long, pour un pourpoint bleu nuit et des élégantes chausses brunes. Il était visiblement inquiet, mais lorsqu'il vit la jeune femme, il tenta un sourire. Il n'y parvint pas.
« -Ravit que vous soyez toujours là. Il fit les cents pas, tournant en rond. Cela fait à peine une heure que les hérauts hurlent les nouvelles, et j'ai déjà une centaine de paysans à ma porte. Par la peste ! Comme si j'avais besoin de ça. (Il jeta un œil à Huyana, toujours au même endroit, lui seul bougeait.) Je vais avoir besoin de vous pour les rassurer. Pas la peine de prendre la parole, votre présence suffira, je pense. Il la jugea de haut en bas. Je l’espère... »
Huyana se contenta de s'incliner, sans un mot, puis elle suivit le baron qui sortit, peu assuré, de la salle. Il se trouva dans le hall, et Gilles, le second serviteur, lui ouvrit en grands les portes de l'entrée. Bombant le torse et levant le menton, il sortit, suivit, quelques instants après, de la jeune femme.
Une petite centaine de personne se trouvait agglutinée devant la demeure, sur le petit sentier de gravillons, et sur la pelouse qui encadrait celui-ci et la bâtisse. Tous chuchotaient, la mine fatiguée et les traits tirés. L'annonce des hérauts en avait effrayé plus d'un, et ils se retrouvaient là, les questions en tête. Lorsque le baron sortit de la demeure, il surplomba le peuple, lui-même sur le perron blanc. Il leva les mains en signe d'apaisement, et les murmures se turent.
« -Messieurs, mesdames, je vous prie, un peu de calme ! Merci. Il baissa les mains. Je crois savoir pourquoi vous vous trouvez tous ici, devant ma demeure, plutôt que dans les champs. Ce matin, j'ai demandé aux hérauts de la ville de crier certaines nouvelles fortes...étranges.
-Terrifiante oui ! Lança un premier homme.
-Un basilic ! Ici ! C'est absurde oui !
-Laissez le baron parler, commenta un troisième.
-Le basilic est suspecté de se trouver dans la région. Nous prenons des précautions pour éviter des morts inutiles ! Voilà ce qu'il en est. J'ai d'ailleurs, (Il se tourna, puis fit signe à Huyana d'avancer.) prit soin de recruter une chasseuse pour vous protéger, en attendant l'arrivée du mage de notre glorieuse Reine.
-Donc il est bien ici ?! Le basilic est bien dans la ville !
-Oh Seigneur ! Qu'allons-nous faire !
-Je vous le dit, il faut quitter la ville !
Une clameur et des murmures s’élevèrent de la foule, qui s'agita de plus en plus. Certains hommes commençaient à hausser le ton entre eux, alors que les femmes priaient à voix haute. Dans la masse, un nouveau-né se mit à pleurer, augmentant la tension.
Huyana, lasse d'une telle situation s'avança et prit la place du baron, qui la regarda faire. Il avait tenté de reprendre la parole, mais plus personne ne semblait vouloir l'écouter. Les quelques personnes qui demandaient le silence se faisait bousculées. La jeune femme forma un signe de ses doigts, puis murmura trois phrases. Elle senti l'Énergie s'emparer d'elle, et elle la concentra dans sa gorge. Ployant tous ses muscles, elle exigea le silence. Sa voix, cent fois amplifiée par l'Énergie, surprit tout le monde, puis ils se terrèrent dans le silence. La jeune femme attendit quelques instants que la magie cesse son effet, puis elle prit la parole.
-Oui. Le basilic est quelque part ici. Mais il n'y a pas de quoi s'inquiéter. Suivez les consignes qui sont affichées, suivez à la lettre, et il n'y aura pas de danger. De plus, je suis ici pour assurer votre sécurité. Si le monstre se présente, je serai là pour l'occire promptement.
-Vous ?! L'occire ?! Une femme ! Laissez-moi rire !
L'homme se mit à rire sans gêne, alors que d'autre se mirent aussi à rigoler de sa remarque. Huyana fit une grimace, et observa en silence les réflexions désobligeantes sur sa personne. Elle fixa de ses yeux de pierre l'homme bedonnant aux bretelles, puis, d'un geste rapide et précis, elle prit son arc, encocha une flèches et tira à ses pieds. La flèche en pointe de fer se planta à deux pouces de son gros orteil. L'homme regarda la flèche, puis leva la tête vers la jeune femme, qui avait déjà encoché une nouvelle flèche.
-La prochaine sera dans l’œil, manant. Elle regarda la foule, qui s'était tut. Et je ne supporterai pas d'autres remarques désobligeantes. Je suis ici pour m'assurer que vous restiez en vie, mais je peux toujours fermer les yeux si j'estime que vous m'avez montré trop peu de respect. (Le baron s'apprêta à dire quelque chose, mais elle le fit taire d'un seul regard.) Le basilic, s’il est toujours ici, sortira de nuit. Il aime les coins d'eau stagnants ainsi que les puits. Il a horreur des coqs et des belettes, et, contrairement à la légende, il ne tue pas d'un regard. Cependant, il vous tuera par sa seule présence. Si vous le croisez, reculez, sans gestes brusques, et fuyez. Son haleine fétide est fatale, et même sa peau créait des émanations mortelles. Mais sinon, je vous assure qu'il n'y a rien à craindre.
-C'est sûr, il n'y a rien à craindre ! Lança dans la foule un jeune homme au chapeau de paille.
Huyana le regarda sévèrement, puis répondit encore plus sérieusement.
-Tant que je serai ici, oui, il n'y aura rien à craindre. J'en fais le serment.
Sa tirade finie, et malgré le tumulte, elle recula, et fit signe au baron de s'avancer à son tour. Celui-ci ne se fit pas prier, et leva à nouveau les mains en signe d'apaisement.
-Je vous le dit mes braves gens, vous pouvez rentrer chez vous l'esprit tranquille. Tant que vous suivez les consignes, tout se passera bien.
Peu rassurés et contraints, tous, se mirent en route en direction de leurs foyers ou de leurs ateliers. Rapidement, le calme se posa à nouveau sur la demeure, et seul le long soupir du baron vint troubler le silence à nouveau trouvé. Il se tourna et regarda Huyana qui observait la ville, la mine sévère.
-Voilà une bonne chose de faite. Je vais retourner à mon labeur, quand à vous, vous...
-Moi ? Elle le regarda à son tour. Moi, je vais vous demander une petite avance. Seulement quarante deniers d'argent, mais il me les faut pour remettre à neuf quelques pièces de mon matériel et pour l'achat d'un cheval. Il me les faut, car, monseigneur le baron, je ne crois pas que le mage arrivera à temps.
Le baron la regarda avec horreur.
-Mais...Qu'est-ce qui vous fait croire une chose pareil ?
Huyana tourna à nouveau la tête et regarda l'horizon, et la ville. La demeure, légèrement en hauteur, surplombait celle-ci. Puis, elle inspira fortement par le nez, et ferma les yeux. Lorsqu'elle ré-ouvrit les yeux, elle observa à nouveau le baron, d'un regard dur. Ses yeux de pierre avaient prit la teinte de l'argent, clairs et brillants.
-Car je le sens. Je tuerai le basilic cette nuit. »