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Travailler pour vivre ou vivre pour travailler ?
Posté le 29/03/2021 à 22h10
mraaw
Posté le 29/03/2021 à 22h10
J'ai lu en diagonale quelques pages et vais apporter peut être un témoignage peu courant.
Je vis à cheval sur la route la majeure partie du temps (sauf covid, rhino et plein hiver), et ne m'arrête pour travailler que très peu. Je fonctionne dans le sens inverse de la majorité des gens, j'estime mes frais et calcule la somme nécessaire pour savoir combien de temps et à quelle intensité travailler plutôt que de chercher un salaire haut et me creuser la tête à savoir comment le répartir (et qu'il n'y en ait jamais assez). Je fuis les CDI comme la peste.
Concrètement, je fais du CDD ou du saisonnier agricole, mais de toute façon à la fin de la journée je n'y pense plus ! Partir la tête pleine de travail et passer ma soirée à penser boulot c'est fini.
En saisonnier, l'avantage certain que j'ai avec mon mode de vie c'est que je peux envisager la rémunération à la tâche/au rendement ou à l'heure. De cette façon si c'est une saison très courte de quelques jours je peux faire 12h par jour et être payée au rendement c'est tout bon pour moi. J'ai eu des patrons très arrangeants aussi : heures libres et payées, base 35h/semaine au delà on passe en heures supplémentaire, samedi et dimanche travaillés si souhaités. J'ai une fois fait une semaine à 20h et une autre à 55h dont 6 le dimanche... Et bien le chèque m'a beaucoup plu !
Autre avantage pour moi : ce sont des postes non qualifiés ou à formation très rapide (une journée par l'employeur qui a sa propre méthode et ses exigences) et surtout il y en a partout en France dans tous les domaines.
Autre avantage aussi : là où on cultive/élève on trouve à loger mon cheval et planter ma tente.
Je suis en Dordogne en ce moment, et ici, quelqu'un qui fait du saisonnier pourrait facilement travailler 10 mois par an en agricole, sans diplôme ni qualification, on enchaine les multiples périodes de taille, récolte et conditionnement dans un rayon de 20km, il y a un creux seulement de la mi mars à la mi mai. Ici l'immobilier n'est pas très cher tant à l'achat qu'en location, le coût de la vie en général est plutôt normal à faible selon le mode de vie de chacun. Les collègues que j'ai eu n'ont pas la nécessité financière de courir après les contrats et ne s'inquiètent pas d'être dans le rouge, ils sont propriétaires de leur maison avec jardin, ont des animaux, font des travaux et partent en weekends.
En ce qui me concerne pour les chiffres
Par mois : 80 de courses + 40 d'extras (un restaurant! ou autre), je lisse à 150 pour être large
150x12 = 1800 par an
J'ajoute 150 pour une paire de chaussures ou du matériel imprévu et j'arrondis même à 2000, soyons fous !
C'est à dire que mes frais par an, sont inférieurs au salaire par mois de certaines personnes. C'est un salaire confortable mais pas exceptionnel non plus.
Evidemment c'est si tout va bien, pas de maladie ni pour moi ni pour le cheval, pas de gros matériel à changer etc etc. Allez, je peux même doubler le chiffre pour viser 4000€/an. C'est donc pour moi, 2 mois au SMIC en 35h pour le minimum, 4 pour être à l'aise. Donc travailler 4 mois d'hiver et un mois en plein été c'est presque "du luxe" et je vis confortablement selon mes critères.
Forcément, je vis seule, je n'ai ni loyer ni véhicule (ni l'assurance qui va avec ces deux là) ni crédit ni pension. Par contre, j'ai investis dans du matériel de qualité à un tarif correspondant à plus qu'un équivalent loyer. Le cheval est équipé sur-mesure de la tête au cul et est archi suivi sur le plan santé. D'ailleurs cette année, il a eu besoin de beaucoup de soins et de visites de plein de pros différents pour la remise en forme, j'ai changé tout son matériel... Mais c'est mon compagnon de vie, mon véhicule, mon outil de travail parfois et il transporte quasiment toutes mes possessions, ce que je dépense pour lui est investis tant dans sa qualité de vie que la mienne et c'est un mode de vie complet pas un simple loisir.
Je rêve de me poser, pouvoir me projeter plus loin que été-hiver. Là, mon été s'est décidé le week end dernier, sinon ma projection s'arrêtait au 21 avril... Maintenant, ça s'arrête fin juillet. Début d'été, je programmerai l'hiver et ainsi de suite. Enfin, si ça se fait tant mieux, mais ça ne m'inquiète pas non plus.
Je rêve de trouver un lieu où me sentir bien, avoir envie de m'arrêter et m'installer, construire quelque chose et appartenir à un environnement (géographique, humain...) et je poursuis ce rêve avec ferveur, mais pas question pour moi de me poser quelque part par dépit et me disant que je trouverai mieux plus tard, ça c'est pas possible, si on est posé et qu'on a jamais mis les pieds ailleurs comment on sait si c'est mieux ?
Quand les gens m'accueillent ils commencent comme ça : Vous ne travaillez pas ? C'est bien, il faut en profiter c'est bientôt la rentrée!
Comme si j'étais en vacances entre deux années d'école, mais non, je vous assure, ça n'est pas des vacances, c'est un choix de vie et l'argent ne tombe pas non plus du ciel, tout comme personne ne paiera jamais mon loyer à ma place, on ne me paie pas non plus mon mode de vie à cheval, je vais bien travailler pour pouvoir continuer, je n'ai juste pas les mêmes besoins financiers donc pas la nécessité d'avoir absolument un travail en continu. Et l'école, même si ça m'a bien réussit, j'y suis toujours allée à reculons et je passais mes week ends déjà sur la route à pied, à vélo ou cheval. Même en pleine semaine quand j'avais deux jours de libre...
Alors généralement, je remets en pourcentage : sur votre salaire moyen, à la fin du mois après charges, frais courants et impôts, combien il reste ? Moi quand je suis au smic 35h, j'ai 85%. Alors je ne brasse pas les mêmes chiffres, mais mes pourcentages sont énormes!
Par contre, impossible pour moi de travailler pour quelque chose de trop éloigné de mes valeurs, même en agricole je fais attention à l'employeur pour qui je travaille. Après, étant donné que je ne vise que des contrats courts, que ce soit moi ou quelqu'un d'autre, ce poste sera forcément occupé et l'entreprise fonctionnera aussi bien. J'ai 23 ans et j'ai déjà fait tellement de métiers : palefrenier, gérante d'écurie, cavalière, designer, trieuse de prune, tailleuse de fruitier, prof d'anglais, prof de français, agent d'entretien, couturière, vendeuse, serveuse et une multitude de petites expériences courtes dans les métiers de l'artisanat. C'est aussi quelque chose qui me passionne : je veux tout apprendre donc changer de métier est un vrai plaisir pour moi! J'ai été un peu à mon compte mais comme je ne veux pas penser travail hors des heures dédiées, je ne l'ai fait que pour répondre légalement à des demandes spécifiques de clients, avoir une assurance et pouvoir facturer, pas pour faire de la pub et étendre mon activité. Et je préfère nettement être salariée pour ce qui paie mes quelques frais, c'est beaucoup moins de prise de tête, par contre être à mon compte pour un métier-passion par plaisir (et donc pas du tout nécessaire) ça c'est en train de se faire!