Avec un peu de retard, voilà le compte-rendu tant attendu...
Samedi matin, grand soleil, pas trop de vent... ça y est, le jour J est arrivé !!!

Vers midi, petit message de Muriel : "Coucou, Ufano est monté par Enzo (son fils) maintenant au moins il ne bougera pas cet aprem".
Je ne saurais dire pourquoi mais la colère m'envahit !

Il est vrai qu'elle m'avait demandé mercredi si je voulais qu'Enzo sorte Ufano d'ici le samedi, et je n'y voyais pas d'inconvénient. Mais je ne m'attendais pas à ce qu'il le fasse le samedi même ! Cette nouvelle me fâche énormément. Peut-être parce que je m'étais dit que cette journée serait "ma journée" ? Je me sens un peu spoliée sur le moment, je suis peinée, énervée... Comme l'impression d'être une débutante à qui on sort son cheval histoire qu'elle soit tranquille. Au fond, peut-être est-ce aussi que j'attendais ce moment comme un bilan, une mise au point entre mon fauve et moi, un "duel" après 5 mois et 1 semaine. Pour voir où il en est. Où j'en suis. Où notre binôme en est... A croire que Muriel l'a senti, elle m'appelle. J'ai beau faire des efforts, elle sent très vite que quelque chose ne va pas. "Tu m'en veux ? Je sais que tu m'en veux, je m'en doutais. Mais je m'en fiches, je veux que ça se passe bien, je sais que tu seras déçue sinon." Elle n'a pas tord. Elle a même carrément raison. N'empêche, je reste contrariée

Elle me raconte brièvement la séance : elle n'a pas voulu longer Ufano avant, pour le prendre "dans son jus, histoire de voir où il en est vraiment". Evidemment, ça a été sport. J'aurais pu le parier, vu la patate qu'il avait en longe ces derniers temps. Il a embarqué quelques fois Enzo comme à son habitude, mais ça n'a pas trop duré. Ensuite il a bossé, dur, mais Muriel l'a trouvé plus à l'écoute qu'avant. Pour finir et le sécher un peu, Enzo l'a emmené faire un petit tour derrière les écuries. Seul. Apparemment ça s'est bien passé. "De toute manière, il va falloir enclencher la seconde, il faut qu'il comprenne qu'il doit grandir maintenant".
C'est donc avec une boule de contrariété dans le ventre que je pars aux écuries une heure plus tard. Arrivée là-bas, ma colère ne tiendra pas longtemps face à la bonne humeur des filles. On rit, on chante, j'oublie le reste. J'en profite pour monter le dispositif de selle sur lequel s'accroche mon nouveau gilet. Les filles l'essayent d'ailleurs, et le trouvent léger.
L'heure est venue d'aller chercher le fauve. On voit qu'il a bien transpiré le matin. Un bon pansage, protections, selle, filet, bombe, gants... gilet. La boule est revenue dans mon ventre. Mais cette fois ce n'est plus de la colère. On y est ! Les filles m'encouragent, essayent de me rassurer en me disant que tout va bien se passer. En carrière, Muriel n'est pas encore redescendue de chez elle. Les filles sont toutes en selle, j'aimerais attendre mais je sais qu'Ufano va commencer à s'agiter. Tant pis, il faut y aller. Désiré, venu pour l'occasion, me tient la bête. Pied à l'étrier. Gilet attaché. Décollage imminent !
Pauline et Topaze sont restées prêt de moi, on commence à marcher. Je suis hyper tendue, Ufano aussi. Topaze, comme à son habitude, est prête à faire l'andouille. Je décide donc de me coller dans les fesses de Narci montée par Cassandra, il y a peu de risque qu'elle démarre, ça va poser mon lou. Il marche à grandes enjambées mais reste sage, je commence à me détendre mais je ne quitte pas Cassandra d'une semelle !! Muriel arrive enfin, me demande si ça va. J'ai envie de dire non. Je réponds que je suis tendue.
Nous voilà au trot, toujours aux fesses de Narci. Elle se traîne et Ufano commence à chauffer. Il essaye de la doubler, tantôt en piste intérieure, tantôt en essayant de se faufiler entre la clôture et elle ! J'arrive tant bien que mal à le conserver à sa place. J'aimerais faire des cercles, des voltes pour le décontracter. Mais j'ai l'impression qu'il n'attend que ça pour démarrer. On reste donc sur la piste, à la queue leu leu. Je souffle. Mon cerveau tente de prendre le contrôle, de maîtriser ce corps qui ne semble pas vouloir coopérer et se détendre. Il le faut, je ne fais qu'aggraver le problème et je le sais. Mon malaise se lit visiblement sur mon visage, tout le monde me scrute. Je parviens à placer une ou deux voltes, lorsque plusieurs chevaux se retrouvent dans le même coin de la carrière : je sais que l'effet de troupeau apaise Ufano.
On repasse au pas. ENFIN ! Je me décrispe légèrement. Muriel annonce : "Aujourd'hui, on va travailler les départs au galop". J'ai envie de la tuer. De pleurer aussi. J'ai peur, et je n'arrive pas à l'accepter. Je n'ai jamais eu peur comme ça, en 20 ans d'équitation. "Tu te sens prête à le faire ?". J'ai envie de hurler que non, de lui demander pourquoi elle semble s'acharner comme ça sur moi, pourquoi elle n'envisage pas que je suis morte de trouille sur ma selle alors que je sais pertinemment qu'elle le sait. Je m'entends articuler "qu'on va essayer". Je suis face au mur, et je sais que le choix est crucial : où je prends sur moi et je me lance, où je resterai coincée de ce côté du mur pour toujours.
Départ au trot, trot assis, à la sortie du petit côté je place mes aides... et après une longueur dans un galop relativement calme on repasse gentiment au trot et au pas. Je l'ai fait, et ça s'est bien passé ! Mais ça ne suffit pas à me détendre vraiment. On s'élance pour un 2ème passage... départ plein cul, je tente désespérément de le mettre en cercle avant qu'il ne pile devant la clôture qui se rapproche vitesse grand V. Tous les souvenirs remontent. Il finit par tourner et me plante un gros coup de cul avant de daigner s'arrêter en catastrophe ! Ma colère éclate et quelques jurons adressés au diable sur lequel je suis assise éclatent. "Reste calme, ça va être pire sinon". Je me liquéfie. "On y retourne !". Les passages suivants seront tous du même genre : départ plein cul, mise sur le cercle. En plus il refuse d'aller au bout de la longueur (a-t-il peur de Désiré qui s'y trouve pour filmer ? Pourtant il est passé devant des dizaines de fois depuis le début du cours), et me plante systématiquement un écart au 3/4 m'obligeant à le récupérer sur un cercle, qu'il tient de mieux en mieux au fil des passages. Il n'est pas forcément à juste, mais l'objectif est de faire une longueur dans le calme, le reste viendra après.
On change de main. La boule gonfle à nouveau dans mon ventre. Durant l'exercice, on utilise que la partie à l'entrée de la carrière, et à cette main le départ se fait fasse "au reste de la carrière". Pile ce qui déclenche en général chez Ufano des envies de charger tel un cheval de bataille ! 1er départ, petit galop, longueur tranquille. 2ème essai, quasi pareil. Enfin il s'est calmé !! 3ème essai... c'est la débandade ! Départ plein cul, je récupère comme je peux sur le cercle. 4ème essai, idem, je suis à deux doigts de faire un strike en m'arrêtant à 50cm des autres. Je ne comprends pas... POURQUOI ??!!! Pourquoi alors qu'il s'était posé, il recommence à faire n'importe quoi. Pourquoi il ME fait ça à MOI ? "Tu t'énerves trop vite. Prends sur toi". J'ai envie d'éclater en sanglots. JE NE FAIS QUE CA DE PRENDRE SUR MOI ! J'ai les larmes aux yeux et la gorge nouée. Ufano commence à en avoir marre, ça se sent. Muriel me demande d'y retourner quand même. Les deux derniers passages seront relativement corrects : même si les premières foulées sont encore trop rapides, rapidement on prend un galop cadencé et on finit la longueur sans encombres. Pour finir, les autres passeront sur un exercice de diagonale avec changement de pied. Muriel, par principe, me demande si je veux essayer. Cette fois je refuse. Il a assez donné, je veux le laisser sur ses derniers passages corrects et ne veux pas le mettre en échec sur un exercice qu'il ne maîtrisera pas (il n'est déjà pas toujours parti sur le bon pied avant).
On les marche, rênes longues. Il a l'air détendu et apprécie de se balader ainsi à côté des copains. Pied à terre, je suis vidée ! Mes jambes flagellent, je sens que je vais bien dormir. Mais j'ai tenu bon !! Et ça, c'est vraiment le principal !
Le lendemain, je suis retournée aux écuries pour donner un coup de main à Muriel qui accueillait un groupe d'adultes handicapés (physiques et/ou mentaux). Quand je suis allée chercher Ufano pour le lâcher un peu dans le carré d'herbe avec Salem, deux personnes du groupe ont voulu m'accompagner. J'avoue que je n'étais pas rassurée, car je sais combien il s'effraye pour un rien ces derniers temps. Pauline est venue avec moi, histoire de gérer "le binôme", qui bien que très gentil, avait du mal à comprendre que tous les chevaux ne sont pas aussi calmes et tolérants que ceux qu'ils ont montés. Mais, après moultes recommandations et explications sur le fait que c'était un bébé très craintif, ils ont pu le caresser, y compris sur la tête. Il a même accepté un bisou !

C'est quand même un super poney

La journée a d'ailleurs été riche en émotions puisqu'on a reçu l'après-midi une jeune-femme, propriétaires de plusieurs chevaux et cavalière, qui n'avait plus remis les fesses en selle depuis qu'elle était en fauteuil roulant. On a donc assisté à sa remise en selle, après 3 ans d'attente... Un très beau moment ! Fame (ma jack) n'a pas été en reste non plus. Vu qu'elle s'était très bien comportée la dernière fois avec le groupe, je l'ai amenée à nouveau afin qu'elle puisse gambader toute la journée. Elle n'a pas manqué de charmer à nouveau tout le monde, y compris la jeune-femme en fauteuil sur les genoux de laquelle elle s'est installée comme si de rien n'était pour suivre la reprise de l'après-midi bien au chaud, ce qui a bien fait rire tout le monde !